Dire
est important. Recevoir une écoute aussi. Les occasion de dire à quelqu'un
qui soit capable d'entendre avec une attitude neutre et bienveillante est rare
dans la vie. C'est la raison d'être des thérapeutes.
Trop
souvent, on imagine que la libération vient de la verbalisation et de l'écoute.
Or ce qui est libérateur ce n'est pas l'écoute du thérapeute, mais celle
que le patient s'accorde à lui-même. Celle du thérapeute joue un
rôle important en ce sens où elle encourage le patient à accepter de
s'entendre lui-même avec moins de peur.
La verbalisation est commode pour permettre au
thérapeute de guider le patient dans sa recherche, pour l'aider à mieux
considérer, mieux percevoir ce qu'il vient d'exprimer... et surtout ce qu'il
vient de ressentir. Mais la verbalisation n'est pas libératrice en
elle-même. Sauf sur un point : elle permet de clarifier le ressenti en
l'exprimant. Mais ce n'est qu'une infime partie de la libération.
Ce qui est vraiment
libérateur, c'est la rencontre
du patient avec ceux qu'il
a été dans son histoire personnelle et avec ceux dont il est issu dans son
histoire familiale.
De même que nous avions différencié l'accès
par la mémoire et celui par le ressenti, dans les accès par le ressenti,
nous devons différencier le fait de
rencontrer ceux qu'on a été et celui d'accomplir
une régression.
La
régression n'est pas souhaitable : La régression c'est redevenir
celui qu'on a été pour en revivre l'expérience. L'avantage
incontestable est d'y exprimer l'émotion de
l'époque qui était restée enfermée. Mais cela peut produire
des tempêtes émotionnelles qui doivent être canalisées par un
thérapeute compétent. D'autre part, revivre l'expérience ne donne pas
forcément à celui qu'on a été l'information et l'écoute dont il avait
besoin. C'est prendre le risque de replonger dans
la blessure sans la guérir. C'est pourquoi le retour sur le
passé à quelquefois mauvaise presse.
Rencontrer
ceux qu'on a été et ceux dont on est issu : Il
ne s'agit plus de redevenir mais de rencontrer. Celui que nous
sommes aujourd'hui, riche de son expérience et de l'aide du thérapeute,
rencontre, écoute, renseigne et aide celui que nous avons été dans la
zone blessée de notre vie. Cet apparent
dédoublement n'en est pas un. C'est plutôt
sortir d'une fusion. Celui que nous avons été n'est pas
celui que nous sommes, pas plus que notre jambe ou notre main n'est
semblable à notre tête... même si le lien entre les deux est évident !
C'est sortir de illusion que nous ne sommes qu'une
tête. C'est accomplir une
différenciation permettant de rencontrer les autres parties de sa
structure psychique. Cette différenciation et cette rencontre
permettent de libérer les charges enkystées de
façon profonde et durable sans en subir la douleur. A ce
sujet, vous pouvez relire le chapitre "la
quête des parts manquantes".
Échange de
ressources entre le présent et le passé : Celui que nous
sommes souffre généralement de manque de parts de soi mises de côté
pour raison de situations ingérables. A l'époque les ressources du
moment n'ont pas permis à cette part de soi de surmonter la
situation.
En
attendant les réhabilitations, le
présent se joue malgré les manques du passé. Habités par de nombreux vides
dans notre histoire personnelle ou
familiale, nous rencontrons de nombreuses
circonstances présentes nous offrant de retrouver ceux que
nous avons été ou ceux dont nous sommes issus. Pourtant, comme ces
circonstances ravivent les vieilles blessures, elles semblent ennemies. Mais
elles sont l'opportunité d'une rencontre inconsciemment attendue.
Le
présent devient alors une ressource pour le passé : Nous sommes portés à nous rapprocher
malgré nous de ces circonstances antérieures. Les morceaux de notre vie
qui nous manquent nous fragilisent, mais comme nous sommes riches
de notre expérience actuelle nous
pouvons être une ressource pour ceux que nous
avons été.
Le passé consolide
l'assise du présent : Une fois réhabilité, celui que nous
avons été ou ceux dont nous sommes issus viennent trouver leur juste place
en nous et consolident l'assise de notre structure psychique.
Cet
aller retour entre le passé et le présent est un échange de
bons procédés. Celui que nous sommes,
riche de son expérience devient
une ressource pour celui que nous avons été, qui
a son tour, en existant consolide l'assise de celui
que nous sommes aujourd'hui.