Ne jamais se vendre
Ce serait très aidant, pour commencer, de ne plus se
laisser abuser par cette
affirmation moderne selon laquelle "Il
faut savoir vous
vendre". Rien n'a sans doute été inventé de plus pervers, de plus
dégradant et de plus décourageant.
Avez-vous remarqué que celui qui cherche à se vendre risque d'être acheté
et que celui
qui achète devient propriétaire! En étant un peu cru, on peut
aller jusqu'à dire que même une prostituée ne se vend
pas ! Elle vend un service (son client n'est pas son propriétaire). Celui qui
se vend est donc tombé plus bas que la prostitution car il n'est plus
propriétaire de lui-même. Il appartient à celui à qui il s'est vendu et
cela s'appelle "esclavage". Dieu merci c'est aboli (mais hélas pas
partout dans le monde)!
En apparence anodine,
cette
petite phrase assassine l'honneur de celui à qui on l'adresse... et qui y croit!
Un
être humain ne peut
s'acheter car sa valeur est trop grande....
elle est infinie et même le plus riche des employeurs ne peut se la
payer. En
plus, cela ne lui servirait à rien car il n'a pas besoin d'être propriétaire
de son employé. Il a seulement besoin d'être
propriétaire de sa production... afin de
la vendre
lui-même à ses clients.
Éviter de se considérer comme un "demandeur"
d'emploi
Adopter le statut de "demandeur"
d'emploi est un piège subtil. Cela semble anodin, mais ça
tue le potentiel de celui qui s'y soumet. S'il semble plus commode
de garder l' appellation "demandeur d'emploi" pour les papiers
administratifs, il est profondément recommandé de ne pas en adopter l'état
d'esprit.
Celui qui veut travailler ne doit pas "demander"
un emploi. Il doit plutôt "vendre" une
production. Si l'être humain a une valeur par essence infinie et
non mesurable (donc non achetable), ce qu'il produit a par contre une valeur
mesurable dont on peut négocier la vente. C'est le principe du commerce.
Le salaire
Les différentes aides financières à la disposition des
personnes sans emploi, sont une excellente invention qui va vers le respect
de l'être humain. Mais il ne faut pas pour autant confondre un salaire avec une aumône ou une aide sociale.
Un salaire, c'est avant tout une transaction
où un employeur achète une production à
quelqu'un qui sait l'accomplir. La valeur de la production étant mesurable, il
détermine ainsi combien il l'achètera (salaire plus charges). Il ne
peut acheter que quelque chose que lui-même revendra à ses clients. Ce n'est
pas de la philanthropie, c'est un acte commercial.
Dans notre quotidien il en est de même pour chacun de nous.
Quand vous allez chez le boulanger, vous ne lui donnez de l'argent que parce qu'en
échange il vous donne du pain!
Vous pouvez tout de même décider de donner de l'argent à un
boulanger qui ne vous donne pas de pain et qui a perdu sa boutique, qui est
devenu SDF, qui a besoin d'aide. Il est important de savoir aussi avoir cette
générosité dans la vie. Mais il ne faut pas la mélanger avec la notion de
travail.
Faire le bilan de ce qu'on sait produire
Souvent on a plus
d'expérience qu'on ne le croit. Ce qui est important, c'est de définir
ce qu'on peut vendre comme production. La première impression est
peut-être qu'on n'a rien à vendre. Mais c'est toujours faux.
Même
quelqu'un qui n'a pas travaillé depuis longtemps a une expérience. Au
minimum, Il a vécu (même s'il a mal vécu). Il a forcément expérimenté
des aspects
de la vie sociale et économique qui lui sont spécifiques. Cela fait de lui
un individu disposant d'une vision et d'une expérience que d'autres n'ont
pas. Or cela a beaucoup de valeur.
La production
peut être une production d'objets (usinage, plomberie, menuiserie, oeuvres
d'art etc...) ou une production de services (accueil, rangement, nettoyage, organisation,
vente etc...)
La question est d'identifier dans son expérience
de vie (personnelle et professionnelle) ce qu'on a
vécu et qui donne une compétence monnayable.
L'employeur
loue une compétence et achète une production
L'employeur n'achète jamais un collaborateur. Il achète ce
qu'il produit. Donc il faut identifier ce qu'on peut produire et que
l'employeur a besoin d'acheter.
On
ne "demande" pas un emploi, on "vend" ce qu'on produit. On doit arriver
chez l'employeur la tête haute comme un commercial qui représente une
entreprise dont il va proposer les articles. Celui qui sollicite l'employeur ne
se vante pas. Il a analysé son expérience personnelle et y a trouvé des
compétences susceptibles d'intéresser cet employeur. Ce sont ces compétences
qu'il met en avant.
Comme un
commercial, il doit avoir un solide argumentaire, mais aussi tenir compte des objections,
des contraintes économiques, de la concurrence
(il y a d'autres chercheurs d'emploi) etc... Il devra mener son entretien tout
en sachant que peut-être l'employeur n'aura pas besoin de ce qu'il propose.
Mais cela ne remet pas en cause la valeur de sa
production. C'est simplement que cette
valeur n'est pas toujours adaptée au besoin de l'employeur. Il
devra dans la mesure du possible retirer de cet entretien un bon contact... et
l'adresse de quelques confrères de l'employeur qu'il serait pertinent de
contacter (si possible de sa part).
Pour que l'entretien se
déroule au mieux, vous pouvez lire sur ce site ce qui concerne
la communication
et ses applications professionnelles.
Un CV doit se lire en un clin d'œil.
Celui qui va vous lire est souvent submergé
de documents. Il dispose de peu de temps. C'est
une attention délicate à son égard que de lui proposer un
document compréhensible d'un seul regard. Les titres, la structure et les
mots clés doivent sauter aux yeux sans avoir besoin de déchiffrer (la
lecture détaillée viendra seulement après cette première approche).
Pour cela la présentation
doit être aérée. Laissez tomber l'idée stupide de tout mettre sur une
page. La formule d'une grande feuille A4
pliée en deux est préférable. Elle vous permet d'articuler et
d'aérer sur 3 ou 4 pages un texte qui, si on sait choisir les titres, va
être plus facile à appréhender. Naturellement il serait maladroit de
profiter de ce plus grand espace pour écrire en détail le roman de sa vie!
Cette
formule ( feuille A4 pliée en deux) constitue comme un
petit dossier dans lequel l'employeur pourra ranger votre lettre de motivation
pour ne pas l'égarer.
Possibilité
de présentation:
Page
1: Photo + identité + une phrase de motivation donnant envie d'ouvrir le
document.
Page 2 : Diplômes et formations.
Page 3: Expérience professionnelle.
Page 4: Expérience personnelle.
Les
stages pourront apparaître en 2 ou en 3 selon la densité du texte.
Une
page A4 pliée en deux est un bon outil car elle ne constitue qu'un document
(une unité).
Au
contraire, 4 pages agrafées seraient infiniment moins bien car
psychologiquement il y a trop de documents (4 unités).
Même quand on a peu de texte à mettre,
cette formule de la feuille A4 est souhaitable pour bien aérer la
présentation. Mais il ne faut tout de même pas exagérer!...si
vous avez vraiment trop peu de choses à écrire, optez pour une seule
page où les titres et les paragraphes seront tout de même faciles à cerner en un
regard.
Dans tous les cas, la
présentation aura une
esthétique montrant au moins qu'on respecte le lecteur. Mais si la
présentation doit être soignée, claire et si possible originale.... il est
recommandé de ne pas en faire trop. Être brillant oui, clinquant non.
Ce
que cherche l'employeur
Le CV doit refléter en un clin d'œil ce que
l'employeur a
besoin de savoir. Mais qu'a-t-il besoin de savoir? Il a besoin de
s'assurer ce que vous pourrez produire.
Au fond il se moque
pas mal (au moins dans un premier temps) que vous ayez travaillé à tel
endroit, que vous ayez fait tel stage, Ce qui lui importe, c'est ce
que vous serez en mesure de produire dans son entreprise.
Pour
se rassurer sur ce point, ce n'est pas où vous êtes
passé qui lui importe, mais c'est ce que
vous en avez retiré de compétences utiles
à son entreprise pour assurer la production qu'il vendra
à ses clients.
Ce n'est que dans un deuxième temps
qu'il cherchera la justification des compétences dans votre historique
professionnel. Puis dans un troisième temps il aura besoin de vous
rencontrer.
Pour l'entretien, vous
pouvez lire sur ce site ce qui concerne
la communication
et ses applications professionnelles.
Compétences acquises dans le domaine professionnel
Vous
allez donc, pour chaque employeur chez qui vous avez travaillé, pister
ce que cela vous a apporté d'expérience justifiant une ou plusieurs
compétences. C'est une démarche assez inhabituelle car ce
que nous savons faire nous semble ordinaire et seul ce
que nous ne savons pas faire nous semble extraordinaire. Donc le
premier sentiment est de dire que ça ne nous a pas apporté grand chose! Erreur.
Après toute expérience, même modeste, vous savez
des choses que vous ne saviez pas avant. Vous avez aussi acquis
ou vérifié des compétences précises.
Quelques
exemples:
Vous avez été veilleur de nuit:
c'est la vigilance et la capacité à être seul. C'est aussi la
capacité à gérer correctement son sommeil.
Vous avez été manutentionnaire dans un magasin de
stockage:
c'est le sens de l'effort, de l'ordre et de la précision.
Vous avez été
ouvrier à la chaîne: c'est le sens de la qualité dans un acte
répétitif.
Vous avez été contrôleur de
fabrication: c'est la
connaissance des interactions délicates entre le besoin de qualité du
client et les impératifs de production (capacité à prendre en compte
la contradiction "Urgence/Qualité").
Vous avez été dans un service
d'accueil: c'est le sens de l'écoute, du renseignement précis et rapide,
de l'apaisement des personnes mécontentes.
Vous avez été au standard
téléphonique: c'est le sens de la rapidité, la capacité à mémoriser
les services de
l'entreprise, la gestion de multiples appels en même temps avec le sens
de la qualité et de l'image de l'entreprise etc...
J'ai
utilisé ci-dessus des exemples de métiers simples car tout métier
exercé apporte une expérience que je vous recommande de lister avec
soin. Mais n'en faites pas trop. L'analyse doit
être honnête sous peine de rejet lors de l'entretien... peut
être même dès la lecture du CV!
Naturellement tous les
métiers méritent une telle approche: cadres, ingénieurs, médecins, infirmières,
aides-soignantes, kinés, directeurs, commerciaux, travailleurs sociaux
auront avantage aussi à présenter leur expérience de cette manière.
Compétence
acquises dans le domaine extra professionnel
Il
n'y a pas que l'expérience professionnelle. D'ailleurs certaines
personnes en ont très peu, d'autres pas du tout. Il faut se rappeler que le
seul fait de vivre donne de l'expérience. Évidemment, pas
d'expérience professionnelle du tout est désavantageux. Mais même dans
ce cas, ce type de bilan est important et on est souvent étonné de
découvrir ce qu'on a acquis.
Quelques
exemples:
Vous
êtes une femme au foyer? Une femme qui n'a jamais travaillé à l'extérieur mais qui a accompli l'éducation de
plusieurs enfants, qui a organisé le fonctionnement de sa maison
(capacité d'organisation), géré le budget (sens des réalités),
l'emploi du temps (ponctualité), les devoirs des enfants (sens pédagogique), réglé
des tensions (gestion des conflits) etc.. est loin de manquer d'expérience.
Une personne qui participe à une activité extra professionnelle peut
acquérir ou développer des compétences utiles à l'employeur.
Amateur
d'alpinisme? L'employeur se moque pas mal de savoir que vous faites de l'alpinisme. Mais si
c'est pour mettre au service de son entreprise votre sens de la
solidarité (cordée) de la confiance (équipe, projets) et de la
préparation minutieuse d'une opération (qualité) associée à un sens élevé
de la sécurité... ça devient plus intéressant.
Vous
aimez le patin à roulettes? Peu lui
importe aussi que vous fassiez du patin à roulettes. Mais si c'est pour
expérimenter un sens aigu de l'équilibre. Un esprit d'équipe dans le
club où vous allez, et mettre en avant le goût de faire des choses
nouvelles avec un esprit d'adaptation.... c'est aussi plus intéressant!
Vous
collectionnez les timbres? Peu
lui importe certainement aussi que vous collectionniez les timbres. Mais si c'est
pour mettre en avant un goût pour l'histoire de l'être humain reflétée
dans des objets simples qui marquent les grands virages de l'humanité
(découvertes scientifiques, manifestations sportives, grandes causes humanitaires...).
Si c'est pour évoquer la capacité d'organisation, de classement et de
rigueur dans l'estimation de la valeur, ça prend un tout autre sens.
Il
en sera de même pour toute activité sur laquelle on veut bien se pencher
un peu. Osons mesurer ce qu'elles nous apportent de compétences
négociables comme un "plus" auprès de l'entreprise à qui l'on
propose de vendre sa production. Comme pour le domaine professionnel, on
aura aussi ici le bon goût de rester dans une analyse honnête sous peine
de provoquer l'inverse de l'effet recherché.
Vous avez analysé votre expérience
professionnelle et personnelle sous l'angle des compétences utiles
à votre futur employeur? Vous avez défini la production que vous projetez de
vendre à cet employeur? Il vous reste à rédiger une lettre de
motivation à la hauteur de votre CV. Concise, claire, mettant en valeur
l'essentiel.
Dans toute rédaction de document, pensez au
lecteur, facilitez lui la lecture (même et surtout sur un document manuscrit)
en réunissant votre texte en trois à cinq paragraphes de quelques lignes
seulement (deux à cinq lignes chacun).
Il y aurait bien d'autres choses à dire sur la recherche
d'emploi. Il y a certainement aussi beaucoup à découvrir ou à inventer.
Il existe de nombreuses lectures sur ce sujet.
J'ai
souhaité écrire cet article surtout pour mettre un peu de baume au cœur de
ceux qui se sont laissés abuser par ces phrases assassines: "être
demandeur d'emploi" et "il faut savoir se vendre".
Ces deux points ne sont dénoncés nulle part à ma connaissance.
Le mensonge est même copieusement entretenu comme un credo stupide
et dévastateur qui détruit insidieusement, autant les entreprises que les salariés et
les chercheurs d'emploi.
Pour une meilleure santé du
monde du travail, de l'entreprise, de l'administration, du secteur
sanitaire et social. Pour la santé et la motivation de ceux qui y
assurent la production (de la direction générale jusqu'au balayeur):
Ne plus chercher à se
vendre
mais chercher à
vendre sa production et à
louer sa compétence
Ne plus être
"demandeur" d'emploi
mais "vendeur" de sa production
La
recherche d'emploi reste néanmoins un art difficile aujourd'hui. C'est
pourquoi on n'y met jamais trop de soin. Le plus dur est de ne pas se
décourager quand l'aboutissement tarde trop à venir. Dans ce cas le fait de vendre
sa production plutôt que de se vendre soi et d'être
vendeur plutôt que demandeur permet de garder un minimum de
courage et de dignité dans ce moment délicat et trop souvent douloureux.
Thierry TOURNEBISE
Pour
les entretiens, vous pouvez lire sur ce site :
communication
et ses applications professionnelles.
ainsi que l'ouvrage "Se
comprendre avec ou sans mots"
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