Dans les maisons de retraites les personnes âgées ne sont
pas forcément en fin de vie. Elles sont cependant déjà dépossédées de presque
tout. Les
centres d'intérêt et l'énergie les a
quittées.
Le temps qui passe n'est plus ponctué par les fuites et plaisirs coutumiers de l'existence ordinaire
qui ne
leur sont plus accessibles. Les personnes âgées sont soudainement projetées dans un monde sans
évitement... mais où tout le monde continue
à éviter!
Quand elles disent qu'elles veulent rentrer à la
maison, on
leur explique souvent que ce n'est pas possible, sans écouter ce que cette maison
représente pour elles. Quand elles disent se sentir seules on les rassure
fréquemment en
leur disant que nous sommes là, ou que bientôt elles vont avoir de la visite...
mais sans écouter la solitude dont elles essaient de nous parler... etc.
Il y a tellement de choses délicates à accompagner
en ces personnes qu'on
pourrait presque parler d'accoucher la vie qui est en elles... toutes ces parts
restées en suspend. S'occuper des personnes âgées, c'est pratiquer
l'accouchement d'une vie.
Exemple : Quand une personne de 98 ans
pleure en réclamant sa mère, elle n'est pas forcément si désorientée...
elle parle du manque de mère qu'elle ressent. Elle parle de la raison de sa
détresse. Ce manque de sa mère peut dater du deuil non fait quand elle l'a
perdu, aussi bien que de l'enfance où elle a souffert de son absence. Le
meilleur moyen de la ramener dans le présent c'est de lui faire d'abord
parler de son manque, afin qu'elle puisse se réapproprier ces bouts de vie
meurtrie et y mettre de la paix.
Au lieu de cela la pratique
institutionnelle veut qu'on la resitue en lui demandant "quel âge
avez-vous"... elle répond alors "ah c'est vrai, elle est
morte!" Nous venons alors de contribuer à lui faire perdre la raison
de son ressenti. Nous venons de l'amputer de la part de vie qu'elle essayait
de se réapproprier. Nous venons alors malencontreusement de participer à
sa démence (elle n'a plus de raison).
Même quand leur situation matérielle et physique est désastreuse...
quel bonheur ce devrait être de les accompagner vers le plus de vie que
permettent la communication
et la maïeusthésie.
Pour en savoir plus sur
l'approche vous pouvez lire les articles
Personnes âgées
Psychologie
et violence dans le grand âge
Les personnes désorientées (âgées
ou non) sont souvent des personnes en train de retrouver la raison. Ce qui
semble inadapté au présent parle en fait d'un bout de leur vie qui émerge
pour être cueilli comme une fleur précieuse.
Si par maladresse on veut les en
éloigner, pour leur greffer notre raison à nous... nous contribuons
malencontreusement à leur faire perdre la leur.
Il ne faut pas confondre quelqu'un
qui a des problèmes d'orientation spatiale ou temporelle pour des raisons
d'atteinte neurologique et quelqu'un qui est en train
d'accéder à sa raison. Dans le premier cas la pratique du
style "quel âge avez-vous?" est bonne (comme une forme
d'ergothérapie). Dans l'autre elle est désastreuse et contribue
même à développer la démence qu'on voulait éviter... à
défaut de rencontrer et apaiser les bouts manquants de sa vie, la personne se
débranche alors dans une ultime réaction de survie!
Pour d'autres information lire
sur ce site : Personnes
âgées -Autonomie, Dépendance, Santé mentale ainsi que Psychologie
et violence dans le grand âge
Pour en savoir plus sur
l'approche vous pouvez lire les articles
Psychologie
et violence dans le grand âge
Relation
d'aide (42 pages)
Résilience
(28 pages)
Assertivité (13 pages)