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et violence dans le grand âge ainsi que
Humaniser la fin de vie et Communication
thérapeutique
Un article
destiné à tous ceux qui s’interrogent sur la dimension humaine de cette étape
de la vie,
au personnel de maison de retraite, aux soignants de service long séjour et des
unités de soins de longue durée
Être dans le grand âge et être quelqu’un
Dans mon article de mars un
Quelqu’un en habit de personne j’ai précisé
pourquoi le mot "personne" est ambiguë. "Personne",
c’est le personnage, l’apparence, alors que "quelqu’un"
c’est l’individu. Dans le cas des hommes et des femmes très âgées cette
notion est très importante car leur apparence (le masque, le statut, le
personnage) ne satisfait plus aux critères sociaux habituels. La peau, la
posture du corps, la position sociale et l’énergie sont sortis des normes.
Parfois même les facultés intellectuelles ne sont plus ce qu’elles étaient.
Dans le très grand âge
(d’autant plus que la médecine sait nous prolonger) il arrive que l’autonomie
diminue jusqu’à parfois disparaître. La médecine sait prolonger la vie,
mais pas encore la jeunesse. Alors des institutions
spécialisées viennent en aide à ceux qui ne peuvent plus se
suffire à eux-mêmes.
Dans ce contexte, saurons
nous encore voir le "quelqu’un" qui vit au cœur de ces hommes et
femmes de grand âge, ou bien nous contenterons nous de voir
"une personne âgée" ? Le mot
"personne" désignant peut-être ici le fait qu’on a cessé d’y
voir quelqu’un.
Naturellement, chacun pensera
qu’il faut respecter ces hommes et ces femmes et s’en occuper dignement.
Probablement même chacun le pensera de façon sincère. Mais qu’en est-il
en réalité?
Pour mieux comprendre le grand âge
J’ai entendu un éminent
psychiatre, au fait des problèmes de communication, s’exprimer
à ce sujet dans une émission radiophonique. Il faisait remarquer aux
auditeurs qu’il est difficile de se mettre à la
place de ces personnes malades, grabataires, parfois démentes…
et que de ce fait il est difficile de les comprendre.
En effet il est impossible de se
mettre à leur place. Et c’est là notre problème en communication: pour
comprendre les autres nous essayons toujours de nous mettre à leur place. Or
nous mettre à la place de quelqu’un (même d’un jeune) revient à ne
contempler que notre propre imaginaire et à rester aveugle à autrui.
Sur ce sujet, je ne me répèterai pas et vous renvoie à mon article de
novembre 2000 Les
pièges de l’empathie.
Je partage tout à fait le point de
vue de ce psychiatre sur le fait que nous ne pourrons jamais comprendre les
vieillards des maisons de retraite en essayant de nous mettre à leur place.
Par contre nous
y parviendrons en nous ouvrant à eux, en cessant d’essayer de nous mettre à
leur place. Nous y parviendrons le jour où nous saurons être
attentif à quelqu’un au-delà de son apparence physique ou intellectuelle;
le jour où l’individu comptera plus à nos yeux que
son discours (et que le nôtre).
Nous y parviendrons le
jour où nous saurons être distincts de lui sans en être distant. Le
jour où nous saurons être chaleureux sans être dans l’affectivité.
Nous pourrons le comprendre le jour
où nous saurons mieux entendre que dire; le
jour où nous entendrons avec plus que nos oreilles; le
jour où le cœur (pas l’affectivité, qui elle rend aveugle) affinera notre
perception d’autrui.
Nous
commencerons alors à savoir de quoi nous parlons quand nous parlons de dignité,
d’autonomie, de syndrome de glissement, de démence, de réhabilitation de la
raison etc….
Quand nous parlerons de projets de
vie dans une maison de retraite, il s’agira alors vraiment de projets de vie.
Pour parler de vie il est essentiel
de considérer l’humain dans la globalité de son existence. Cela ne peut bien-sûr se résumer à des évaluations physiologiques ou psychologiques (même si
celles-ci sont utiles).
Une rencontre
Lors d’un de mes derniers stages
animés dans une maison de retraite pour former son personnel soignant, j’ai
particulièrement apprécié, en fin de journée, un
moment d’échange avec une pensionnaire.
Elle est valide, diagnostiquée démente
et Alzheimer, mais ses propos sont remarquables et
profonds. Hélas, dit le diagnostic, elle ne montre que de
l’apparence, une sorte de bluff derrière lequel il n’y a plus rien !
L’amusant de ce diagnostic est qu’il semble décrire l’attitude
ordinaire de la plupart des gens dans la société. On ne dit pourtant pas
qu’ils sont déments !
Naturellement cette vieille femme
a des difficultés de mémoire importantes,
elle ne trouve pas toujours ses mots, elle
est agressive avec d’autres pensionnaires.
Mais elle se sent bien quand elle me parle de sa vie,
de son ressenti, qu’elle
refuse de me dire son âge d’abord en me disant qu’elle ne s’en souvient
plus, puis en me disant qu’il ne faut pas y penser… qu'elle n’a pas peur
de… (sous-entendu la fin) car elle sait apprécier chaque instant l’un après
l’autre… peu lui importe qu’il lui reste quelques jours, semaines ou années.
Puis elle me chante une chanson en y mettant beaucoup
de poésie et de nuances. Après 10 mn d’échange, elle
finit par dire, en parlant de la "fin" sur le ton de la confidence:
"ça fout la trouille. Il vaut mieux ne pas y
penser. Alors je vis chaque instant..."
Sentant que je la comprends, elle
me remercie, chaleureusement. Je ne me suis pas mis à sa place (j’en serai
bien incapable) mais j’ai été ouvert à chacun de ses mots, chacun de ses
regards, de ses gestes. Pas pour les interpréter… juste pour "la
rencontrer" dans ce qu’elle veut me montrer dans cet instant.
J’ai vécu ce moment comme un
moment de rencontre, un moment d’exception. Elle aussi. Naturellement,
c’est beaucoup plus facile dans un instant isolé ainsi, que dans le feu du
travail au moment où l’on a mille choses à faire. D’autant plus que
d’autres pensionnaires ont d’importants troubles physiologiques,
plus du tout d’autonomie et des pathologies graves ou invalidantes.
Le
personnel est mis à rude épreuve dans un environnement difficile.
Ces lignes ne visent aucunement à culpabiliser les
soignants. Rendons plutôt hommage à leur travail et apportons
leur l’aide dont ils ont besoin pour mener à bien leur tâche en y gardant
leur propre intégrité.
Le stress des soignants est
immense dans ces circonstances. D’une part à cause des moyens
(matériels et humains) insuffisants… mais cela tout le monde le
sait et il n’est pas aisé d’y remédier, même s’il faut sérieusement
y penser. D’autre part à cause des attitudes
inadaptées dans le soin, et cela n’a rien a voir avec le manque
de temps et de moyens. Il s’agit là de précisions sur l’aide et la
communication qui ne sont pas connues… mais en plus, la
plupart du temps, j’observe hélas que la façon de faire est
à l’opposé. Sans doute à cause de précisions
manquantes, mal expliquées ou mal comprises. Peut-être un bain culturel qui
nous a enseigné à faire le contraire. Voir dans l’article du mois dernier le
non savoir source de compétence, le chapitre final
traitant de l’écoute humaine.
Les changements d’environnement
Nous faisons dans notre vie plusieurs
expériences de changement d’environnement. Je vous propose un résumé
rapide de quatre de ces étapes. Ceci nous permettra mieux de cerner dans quel
contexte d’existence s’inscrit le dernier changement : celui du grand
âge ou de la maison de retraite.
La naissance
C’est sans doute notre première
expérience de changement d’environnement. Nous y passons d’un
monde où nous bénéficions de tout en continu, vers un monde où il faudra
nous habituer à ne l’avoir qu’en discontinu. Nous entrons dans un monde
d’alternance du manque et du contentement.
L’adolescence
Nous n’y sommes plus un enfant mais
pas encore un adulte. Nous ne supportons plus de dépendre de nos parents, mais
nous ne pouvons toujours pas nous passer d’eux. Nous
ne pouvons être dans le monde d’avant, mais ne
sommes pas encore dans le monde d’après. Période cruciale aussi où
le corps change soudain. Changement "d’habitat": ce n’est plus le
corps d’avant, ce n’est pas encore celui d’après.
Le milieu de vie (40-50)
Un nouveau changement majeur se
produit. Entre quarante et cinquante ans, après vingt
années d’acharnement pour faire notre situation, l’avoir
et le faire perdent à nos yeux de l’intérêt.
Ce n’est plus la même énergie, ou en tout cas plus l’envie de l’investir
de la même façon. Nous avons alors un souhait de plus
de vie, de plus d’être, de plus
d’attention, de plus d’authenticité.
Mais si l’intérêt (pour les choses) est moins présent, l’attention (pour
les gens) n’est pas encore tout à fait au rendez-vous avec la dimension
attendue.
Pendant un temps, comme il n’y a
ni l’un ni l’autre, le quadra-quinqua que nous sommes se met un peu, ou
beaucoup, à déprimer. Puis nous arrivons dans ce qu’on peut appeler la
maturité… on arrive enfin dans la vie. L’énergie
c’est faire, la vie c’est être.
Une sorte de véritable âge adulte. La vie et l’énergie sont deux notions très
distinctes l’une de l’autre.
Parfois ça
ne marche pas et nous nous accrochons alors à une attitude
d’adolescent immature…Il n’y a pas de quoi sourire : cela est
douloureux et pathétique car généralement incompris.
Dans ce moment de milieu de vie, la
situation change aussi du fait que les enfants que nous
avons eus sont adolescents (ils nous renvoient à notre propre
adolescence) et que nos parents eux sont âgés (ils
nous font entrevoir le bout de notre propre vie). Parfois dans cette
époque de notre existence nous essuyons quelques
deuils qui font que rien n’est plus comme avant. Décidément, le décor
n’est plus le même et c’est une nouvelle vie qui commence. Passage
réussi ? Si le passage est réussi, la nouvelle vie qui suit
est plus profonde et plus riche, y compris la retraite.
La retraite
Quand le
passage du milieu de vie fut incertain
(c’est le plus fréquent) ou vraiment raté (ça arrive plus qu’on ne
le croit), quelques uns se raccrocheront à leur travail. Dans ce cas, pour eux,
la retraite sera un changement de monde éprouvant.
S’ils n’y dépriment pas trop,
ils s’y occuperont avec frénésie et se
retrouveront moins libres que lors de leur activité
professionnelle.
Ils ne seront arrêtés que par le
grand âge… à la maison de retraite ! Dans ce cas ce sera pour eux une
épreuve très lourde.
Au contraire,
quand le passage du milieu de vie s’est bien déroulé
dans le sens d’une réelle maturation, la retraite n’est pas éprouvante.
Elle est plus source de vie que d’activisme.
Il en découle que, si dans le grand
âge la maison de retraite y est néanmoins nécessaire, elle y sera mieux vécue.
Des constantes à chaque étape
Il est à noter que ces passages, même
quand tout va bien, s’accompagnent d’un temps de déprime. Pus précisément,
comme à chaque fois que nous sommes confrontés à quelque chose de trop
difficile à intégrer spontanément, nous y traversons 5 étapes. La dénégation
(On n’y croit pas), la colère (Oh non pas
déjà ! C’est trop injuste), le marchandage
(comment négocier au mieux pour éviter), la déprime
(c’est incontournable), l’acceptation
(intégration et passage à l’étape suivante). Naturellement nous prendrons
soin de ne pas confondre résignation ou compensation avec acceptation.
Pour
plus de détails, lire "Se
Comprendre avec ou sans mots" de la page 155 à 218 et "Chaleureuse
rencontre avec soi-même" de la page 31 à 43
Peut être
aurez-vous reconnu là les étapes généralement identifiées pour la fin de
vie? Mais en réalité, elles accompagnent toutes les périodes délicates
de l’existence. Elles se produisent à chaque fois que nous sommes confrontés
à quelque chose qui nous dépasse et ne peut être intégré spontanément.
Après la naissance,
l’adolescence, le milieu
de vie et la retraite, nous
arrivons à l’étape qui nous intéresse dans cet article : la
maison de retraite. Ultime étape avant la dernière.
La maison de retraite
Une vie remplie
Après une existence déjà bien
remplie et ses multiples passages plus où moins bien réussis; après
de multiples instants de joies ou de peines, tant de
réussites et tant d’échecs; après tant
de vie amoureuse et tant d’incertitudes,
tant de satisfactions et de bonheurs mais
aussi de frustrations et d’espoirs déçus; après tant
de deuils venant "agrémenter" la vie d’une façon si
inattendue (on ne s’y fait jamais vraiment)… Après
tout cela, voilà la maison de retraite.
Jusque là, quand
le moral n’était pas au rendez vous, on pouvait ouvrir le frigo
et manger un peu de chocolat, on pouvait faire de la
marche, on pouvait aller au concert,
faire des repas avec des amis ou de la famille… On pouvait sortir
son chien ou câliner son chat. Puis il y avait une intimité :
ce qu’on veut quand on veut ! Tout seul ou avec le compagnon ou la
compagne. On pouvait aller voir du monde… ou rester
chez soi.
Un dénuement
Là c’est différent. Que le
moral soit ou non au rendez vous, les compensations
se font rares. Il reste peu d’objets
personnels. Il n’y a presque pas
d’intimité. S’il n’y a pas autonomie, il n’y a plus du
tout d’intimité.
Naturellement, il y a du personnel
attentionné, il y a des animateurs, il y a des projets de vie, des activités.
Tout le monde fait au mieux pour rendre ce nouveau lieu aussi acceptable que
possible.
Il n’empêche que c’est un
changement radical. Le fait nouveau majeur en est la rareté des
compensations. Il semble que les sources d’intérêt
se soient amenuisées à l’extrême, afin de proposer une ouverture vers
l’attention (je vous proposerai le mois prochain un article détaillé
sur ce mécanisme de la disparition de l’intérêt pour éveiller
l’attention avec le rôle naturel de la déprime).
Sagesse ?
Est-ce cela qui fait dire que le
grand âge est un âge de sagesse ? C’est certainement vrai pour
ceux qui ont su franchir avec succès les différents changements de monde
cités plus haut et qui ont su accepter ce chemin vers plus de vie et de
maturité.
Ultimes Astuces de vie ou de
survie
Pour ceux
qui n’ont pas trouvé cette sagesse, c'est à dire la plupart
d'entre nous, quand les compensations diminuent ou s’arrêtent, l’esprit
peut "se débrancher" un peu pour ne plus souffrir… et cela ne
donne pas franchement des allures de sage!
Certains états
psychopathologiques ont des causes purement physiologiques et nécessitent
alors des traitements médicamenteux et un travail de rééducation adaptés.
Mais la plupart des apparents dérèglements mentaux
ne sont pas que physiologiques. Souvent ils n’ont même rien à
voir avec la physiologie. Ils sont :
Soit
une astuce pour ne plus souffrir. C’est
alors une anesthésie de survie.
Soit
un moyen pour retrouver enfin des raisons oubliées (des moments
d’existences non intégrés qui attendent toujours un soin ou une écoute
qu’ils n’ont pas reçus). C’est alors une pulsion de vie poussant
l’individu à restaurer un bout de son histoire.
Même quand un homme ou une femme
très âgés semblent dire n’importe quoi
et être atteints d’un trouble du comportement…
ils sont peut être en train d’évoquer une raison
fondamentale de leur existence présente ou passée.
La
raison: c’est ce qui est source, ce qui est origine... et
provoque leur apparent trouble actuel. C’est la raison de leur trouble.
Cette raison est un moment de leur
vie où ils ont souffert. Leur pulsion
de survie (réflexe) leur a permis d’éloigner cette douleur de
leur conscience. Mais en même temps leur pulsion
de vie (inconsciente) a assuré la protection de cette part de vie
contre l’effacement.
Ceci est important car si la
pulsion de survie est essentielle pour échapper à la douleur,
elle a l’inconvénient d’amputer d’un bout d’existence, d’un bout de
sa structure psychique.
La pulsion
de vie assure la sauvegarde de cette part de soi oubliée.
Elle en assurera aussi la manifestation ultérieure dans des circonstances
similaires. Le but étant de la réhabiliter pour se guérir de ses manques.
Pour plus de détails, voir le dossier
thérapie de ce site. Dans la fin de vie,
une personne meurt plus en paix si elle est entière.
C’est un aspect de l’accompagnement de fin de vie qu’il faut prendre en
considération en plus de tous les autres.
Ce
qu’on nomme trouble est donc souvent un éclaircissement en marche.
Encore faut-il savoir l’accompagner. Pour cela il faut d’abord avoir
confiance en ce quelqu’un que sont cet homme ou cette femme de grand âge.
Ce qui
devient grave, c’est quand toutes les personnes qui entourent cet
homme ou cette femme très âgés nient cette
raison… jusqu’à la leur faire perdre ! Même avec de
bonnes intentions, cela est trop fréquent.
Autonomie, santé mentale ?
Le personnel est formé aux différents
soins de médecine, de kinésithérapie et d’hygiène . Il a aussi une
attention toute particulière à la vie des pensionnaires, à leur santé
mentale, à leur autonomie, à leur vie sociale et à leurs activités.
Dans de nombreux établissements,
la fin de vie est aussi prise en compte avec autant de délicatesse que
possible pour ceux qui arrivent au bout de leur existence. L’accompagnement
des êtres arrivant à ce dernier passage est de plus en plus évoqué
aujourd’hui (tant physiquement que psychologiquement) Il fait partie intégrante
du rôle des soignants. Ceci concerne les hôpitaux
en général… et bien sûr les maisons de retraite,
services de longs séjours et les unités
de soin longue durée en particulier. Naturellement ce n’est pas
le cas partout et il reste encore fort à faire.
Les médecins
et soignants sont généralement conscients que tout cela est important. Mais
leur formation est insuffisante sur ces
points. La question n’est donc pas de souligner que c’est
important, mais d’examiner comment les choses se passent afin de les
optimiser.
Malgré toutes ces bonnes
intentions (tout de même encore manquantes dans quelques unités de soin), la
prise en charge des patients et pensionnaires ne semble pas satisfaisante.
Le souci des soignants, outre tous
les aspects médicaux, c’est le glissement des pensionnaires dans la dépendance
et la démence. C’est aussi le
glissement vers un désir de ne plus vivre. Ce syndrome
de glissement, c’est quand la personne ne souhaite plus
s’alimenter ni se soigner... se laisse mourir.
L’inverse malgré soi
Le rôle et la volonté des
soignants est d’aider de tels patients ou pensionnaires. Depuis 1988, date où
j’ai commencé à former du personnel de ces établissements, je rencontre un
certain nombre de situations où ce qui est fait
(avec de bonnes intentions) est hélas souvent
l’inverse de ce qui serait souhaitable.
Le projet
étant de motiver
vers la vie, de promouvoir ou de restaurer
l’autonomie, d’éviter, réduire ou soigner les états
de démences ou les troubles du
comportement… que voit-on faire
habituellement ? Je vais vous proposer ci-dessous quelques exemples
de propos tenus avec des pensionnaires ou patients.
Sous des dehors de gentillesse,
ils contiennent des maladresses involontaires
qui conduisent gravement à l’opposé du projet
initial. Ils semblent anodins ou dérisoires, mais ils ne le sont
pas. Le premier aspect à considérer quand on veut parler de projet de vie
pour les personnes âgées… c’est d’abord de rectifier ces fâcheuses
habitudes.
Vous pouvez lire attentivement ces
exemples de propos, afin d'éviter qu’ils ne continuent à nuire. Peu
de gens remarquent qu’ils favorisent la perte d’autonomie, la démence,
et le syndrome de glissement. Il y a là un travail majeur à accomplir. Peut
être même vous demanderez vous parfois en les lisant "mais
en quoi ces phrases sont-elles si mauvaises que ça?" Évidemment,
c’est pour cela que ces propos échappent à la sagacité des soignants.
Mais la nuisance est profonde car ils consistent à
ne jamais tenir compte de ce que vient de dire le pensionnaire…
pour le rassurer, pour être positif, pour le distraire de ce qui le préoccupe
etc. Mais en fait ça le détruit. Ça lui fait du lavage de cerveau, de la cervelle
mixée… ça l’infantilise
progressivement sans que personne ne s’en rende compte.
Imaginez
les phrases ci-dessous avec un non verbal délicat.
L’effet néfaste ne vient pas ici d’un ton excédé.
Il vient plus simplement de l’état d’esprit qui amène à nier l’autre, même
gentiment. Naturellement il peut arriver qu’en plus ces phrases soient prononcées
avec un peu de brutalité… mais là, la nuisance est évidente pour tous.
Ce qui est important, c’est de
pointer que l’effet néfaste de ces phrases existe même en l’absence de
brutalité dans le ton. Elle persiste même avec un ton délicat.
Les repas :
"je
n’ai pas faim" dit le pensionnaire. "Mais il faut manger,
cela vous fera du bien - répond le soignant - Il n’y a pas quelque
chose qui vous ferait plaisir?".
"Je ne
veux pas aller au réfectoire pour manger. Je veux manger dans ma chambre"
dit le pensionnaire. "Mais vous n’allez pas rester tout seul. Si vous
voulez rester autonome, il faut vous déplacer. Allez, je vous emmène" répond
le soignant.
Les toilettes :
"Je ne
veux pas me laver". "Mais si, je vais faire vite… vous
verrez vous vous sentirez mieux. Vous ne pouvez pas rester comme ça!" répond
le soignant.
"Chez
moi je ne me lavais pas tous les jours. Je suis déjà propre vous m’avez lavé
hier". dit le pensionnaire. "Oui mais ici c’est
autrement. C’est plus hygiénique. Il faut se laver tous les jours. C’est
pour votre bien être et votre santé" répond le soignant.
Les souffrances et les
psychopathologies :
"Je ne
sers plus à rien ici" dit le pensionnaire dépressif. "Mais
faut pas dire ça, on vous apprécie ici, puis vous avez vos petits enfants qui
vous aiment beaucoup" répond le soignant.
"Je me
sens seul " dit le pensionnaire Mais nous sommes là, puis
vous allez avoir de la visite" répond le soignant.
"Je
veux mourir" dit le pensionnaire suicidaire. "Ah! vous ne
devez pas dire ça! Vos enfants vous aiment, ils tiennent à vous" répond
le soignant.
"Je
veux voir maman" dit la très vielle dame. "Quel âge avez
vous?" répond le soignant voulant la resituer dans le présent afin
qu’elle ne soit plus dans le délire de chercher sa mère. J’expliquerai
plus loin le danger d’une telle pratique pourtant recommandée par certains.
"Je
voudrais mourir pour retrouver mon mari" dit une pensionnaire
souffrant encore d'un deuil ancien. "C’est vrai, il est mort, mais vos
enfant tiennent à vous, vos petits enfants aussi. Vous allez être arrière-grand-mère.
Il ne faut pas vivre avec le passé" répond le soignant
Les Activités :
"C’est
pas terrible" dit un pensionnaire venant de réaliser un ouvrage
(par exemple un coloriage). "Mais si, c’est très réussi!" dit le
soignant
"J’ai
pas envie d’aller chanter" dit le pensionnaire à qui on
propose de participer à un atelier de chant. "Allez, venez, ça vous
changera les idées!" répond le soignant.
"J’en
ai mare de faire ce truc idiot" dit le pensionnaire à qui on
propose d’envoyer un ballon. "Mais c’est important de le faire pour
garder une bonne capacité physique" répond le soignant.
"Je ne
veux pas faire ce voyage" dit le pensionnaire à qui on propose
une sortie organisée. "Mais si venez avec nous. Ce serait dommage. C’est
l’occasion de rencontrer des gens et d’aller un peu à l’extérieur"
répond le soignant.
Les soins :
"Je vous amène vos médicaments".
"J’en veux pas de vos saloperies"
rétorque le pensionnaire "Ah si ! Il faut les prendre si vous ne
voulez plus avoir mal" renvoie le soignant.
"Je vais refaire votre
pansement". "Vous allez encore me faire
mal!" râle le pensionnaire. "Mais non, je vais faire
attention" dit le soignant.
"Il faut vous lever". "Laissez
moi au lit, je suis fatigué" répond le pensionnaire. "Si
vous ne vous levez pas c’est mauvais pour votre circulation. Allez je vais
vous aider" dit le soignant.
…etc ….etc …etc. Vous n’avez
ci-dessus que quelques exemples de situations et quelques cas de réponses.
Toutes celles que j’ai choisies dans ces exemples
contribuent discrètement à faire glisser les pensionnaires vers la dépendance
et la démence! C’est à dire contribuent à produire le contraire
de ce que l’on cherche… aussi gentil qu’en soit le ton, ces réponses détruisent
progressivement l’équilibre mental et l’autonomie.
La dépendance
L’autonomie
est au cœur des préoccupations. Qu’est-ce que l’autonomie ?
Naturellement quelqu’un d’autonome peut accomplir seul de nombreux actes
de la vie courante. Se déplacer, se laver, manger, aller aux toilettes…
etc.
Mais ce
n’est pas tout. L’autonomie, c’est
aussi de décider par soi-même. C’est aussi le droit d’avoir
des pensées personnelles, des avis, des ressentis, des désirs.
Quand
une chose n'est plus possible et qu'en plus
même l'évoquer ou la désirer devient interdit...
… le monde est alors un monde totalement vide.
Or la difficulté des soignants
est de valider la pertinence d’une demande qu’ils
savent ne pouvoir satisfaire. Tel pensionnaire demande de rentrer
chez lui. Il s’entend répondre "Mais votre maison c’est ici
maintenant!" ou "Mais vous savez bien que ce n’est pas possible,
votre maison a été vendue"…
C’est comme pour le repas, la
toilette, les soins… Le vœux du pensionnaire ne
pouvant être satisfait, il est nié… "pour son bien"!
Chaque soignant pense qu’on ne peut entendre et valider la pertinence
d’une demande quand on ne peut la satisfaire.
"Je ne veux pas manger
aujourd’hui" et on lui répond "Mais il faut manger au moins un
peu. Quelque chose vous ferait plus plaisir?"… personne n’écoute
qu’il ne veut pas manger, ni pourquoi il ne veut pas manger. Tout
le monde essaye de le convaincre plus ou moins doucement. Mais
même doucement c’est une atteinte à l’intégrité ainsi
qu’une douleur de ne pas être compris et d’être nié.
Quand il
veut rentrer chez lui, personne n’ose lui dire "Votre maison
vous manque?" car chacun sait qu’il ne pourra satisfaire ce désir.
Alors il semble plus convenable de le nier.
Pourtant ça
lui serait si agréable de parler de ce chez-lui, de ce qui s’y
trouvait de précieux. De tout ce qui faisait son quotidien et qui lui manque
aujourd’hui. Et bien non! Non seulement il ne l’a
plus en réalité, mais il lui est même interdit de l’avoir en esprit
(par peur qu’il se fasse du mal).
Si
l’autonomie physique ne peut être retrouvée, rendons au moins
l’autonomie psychologique. Il en découlera des améliorations
physiques. Il n’est pas facile de rester motivé à
vivre quand 90 % de vos propos sont niés. Même s’ils sont niés
avec gentillesse, ils rendent progressivement invalide. Puis quand nous sommes
niés même par les "gentils" que nous reste-t-il?
Les contacts lors des soins
offrent mille et une opportunités pour donner corps
à cette autonomie tant recherchée. En validant les propos, les désirs,
les attentes, les ressentis… en leur permettant d’exprimer ce qu’ils
vivent, même si ensuite il faut leur expliquer qu’on ne peut les satisfaire
(quand c’est le cas)
Les troubles psy
Recentrages dans le temps et
l'espace:
S'ils sont parfois nécessaires,
les recentrages dans le temps et dans l'espace, quoi que abondements recommandés,
peuvent aussi être dangereux. Dans tous
les cas il ne doivent impérativement être pratiqués
qu'après avoir aidé la personne à accéder à sa raison.
Dire à la personne de 90 ans qui
appelle sa mère "Quel âge avez-vous?"
pour la ramener à la réalité que sa mère est morte va malencontreusement mépriser
le manque de mère qu'elle exprime et et cela ne l'aide pas. Au contraire, en
niant sa raison (la raison de son ressenti) on
contribue, sans le vouloir, à la lui faire perdre... et à lui faire perdre
en même temps un bout de sa vie
Quand la
raison est validée, la personne se recentrera souvent d'elle-même.
Si ce n'est pas le cas, à partir de ce moment, on peut alors accomplir le
fameux recentrage. C'est dans ce sens que nous examinerons les situations
ci-dessous.
Délires :
Quand des
pensionnaires tiennent des propos apparemment incohérents,
l’habitude est de parler de démence. Parfois ils évoquent comme étant présentes
des choses ou des gens absents.
Telle personne voit des animaux,
telle autre insiste pour ranger son bois, une autre encore dit que quelqu’un
veut la battre. Il yen aura qui veulent aller chercher leur fils à l’école,
d’autres qui appelleront leur mère… etc.
Le soignants et médecins sont désappointés
devant de telles situations. La difficulté est
qu’après un étiquetage "dément" la personne âgée n’est plus
du tout écoutée. On risque alors de passer à côté de choses
importantes. Même en gérontopsy, une infirmière me signalait qu’il est
recommandé à l’équipe de ne pas tenir compte des propos de telle patiente
car elle est hystérique.
Quand
l’homme ou la femme âgés, même en perte de facultés mentales, évoquent
des propos répétitifs, ceux-ci ont forcément une importance. Comme
si une part blessée de leur vie cherchait sans cesse
à s’exprimer car personne ne l’a jamais entendue. Pour
retrouver au moins un peu d’équilibre, il est essentiel qu’on les aide à
exprimer cette raison qui les habite. Le plus curieux est que quand
ils semblent perdre la raison, ils sont en fait en train de la retrouver.
L’instant est donc précieux.
Une femme
âgée veut aller chercher son petit-fils à l’école car il est seul.
Elle semble s’égarer. En l’écoutant on découvre qu’elle parle du jour
où les parents de cet enfant sont morts et où il s’est retrouvé seul à
l’âge de 10 ans... également où elle a elle-même perdu son fils. Cette
part meurtrie de sa vie attend du soin.
Elle ne
perd pas la raison! Elle est en train de retrouver la raison de ce qu’elle
ressent! Trop souvent personne ne s’en aperçoit et même tout le
monde lui dit "mais quel âge a votre petit fils aujourd’hui?"… En
essayant de la ramener dans le présent, chacun contribue alors
malencontreusement à finir de lui faire perdre la raison.
Il est souhaitable de bien
cerner ces notions pour une meilleure prise en charge, un meilleur
accompagnement des personnes âgées dans cette étape de leur vie.
Troubles du comportement
Peurs,
agressivité, insultes. Quand les comportements semblent inadaptés
à la situation réelle, on parlera de troubles du
comportement. Cette appellation indélicate ne tient pas compte là
non plus du fait que si le comportement est inadapté
au présent, il est parfaitement en
correspondance avec une raison. La raison peut être actuelle ou
passée. Mais il y en a une.
Par
exemple: il faut plusieurs mois pour découvrir tout simplement que
ce pensionnaire invalide et agressif souhaitait simplement avoir son fauteuil
tourné vers le jardin visible de la fenêtre. Une autre personne est
agressive quand on la touche (même doucement) pour ses soins. Elle profère
des insultes du genre "salope!". Elle mord, elle griffe. En fait il
faudra trop longtemps pour découvrir qu’elle a subit des actes de pédophilie
dans son enfance…
Un cas remarquable rencontré par
une soignante que j’ai formée il y a pas mal d’années déjà : La
femme âgée mord, griffe, insulte en permanence. Elle est la bête
noire du service. Tout le monde craint de venir lui faire ses soins. Elle
hurle "fous moi la paix salope. Garde tes cochonneries, je suis vielle,
laisses moi crever…" en y ajoutant une extrême agressivité physique. Cette
soignante lui a juste retourné (sur un ton très chaleureux) "Vous vous
sentez trop vieille, vous voulez mourir?" Calmée par cette
question elle répond que oui. Quelques échanges. Des propos cette fois-ci
cohérents. Un apaisement significatif. Cette femme
âgée n’a plus été agressive alors que l’équipe était prête à
l’envoyer en secteur psy.
Le grand âge dément. L'homonyme
de dément veut aussi dire "cesse de mentir". Peut-être se révèlent
à ce moment des bouts d’histoire trop longtemps cachés ou des présents
trop mal entendus.
Parfois la dentition et
l’estomac des pensionnaires justifient que leur
nourriture soit mixée… tâchons surtout
de ne pas faire de même avec leur cervelle… car là rien ne le
justifie… et heureusement personne ne le souhaite!
Nous mettrons donc un soin tout
particulier à éviter tout ce qui , même involontairement, pourrait
ressembler à un lavage de cerveau!
Venir au monde
Toutes ces
raisons qui émergent, sont des opportunités de naissance. De
naissance? Peut-on naître en maison de retraite?
Certainement! Il reste encore bien des parts de soi à naître même dans
cette étape de la vie.
Comme nous l’avons vu plus haut,
c’est le moment de l’existence où les
compensations s’évanouissent. Le dénuement conduit à se
retrouver en face de ce qu’on a si souvent mis de côté. Mais la
tâche est parfois rude au point que la démence puisse être un ultime
recours pour y échapper encore. Heureusement, il y a mieux: accomplir la
naissance des parts de soi restées entre parenthèse.
Notre immaturité de l’époque
nous les a fait mettre de côté. Le moment est venu de les réhabiliter, de
leur donner du soin. Comme si des parts de nous-mêmes
n’ayant pu naître totalement, par immaturité, nous les avions laissé en
garde dans notre inconscient. L’inconscient est un bon gardien de
ces parts de soi en attente. Comme un enfant laissé chez une gardienne, elles
attendent que nous revenions les chercher. C’est donc le moment des
retrouvailles.
La structure
psychique d’un individu a été amputée des moments douloureux par sa pulsion
de survie. Cet individu se tournera plus tard vers ces parts amputées
pour les réintégrer poussé inconsciemment par sa pulsion
de vie. La pulsion de vie pousse à redevenir entier en
invitant à réhabiliter les parts de vie personnelle et familiale manquantes.
Les soignants doivent se préparer
à ce type de travail pour accompagner sainement ces hommes et ces femmes dans
la dernière étape de leur vie et aussi au moment de leur fin de vie.
Projet de vie
Dans les maisons de retraite, il
est souvent question de projet de vie pour les pensionnaires.
Pour mieux mettre l’accent sur
la vie, tentons de clairement différencier la vie de
l’occupationnel. Naturellement, il faut des activités et des
occupations ne serait-ce qu’au titre du maintient du corps et de l’esprit.
Mais pour ce qui est de donner plus de vie cela va bien au-delà des
occupations.
Tâchons
de ne pas renouveler le corollaire de jeunesse, le fameux plan de carrière
en le transmutant en projet de vie. Il s’agit bien sûr ici de quelque chose
de beaucoup plus subtil.
Mettre
plus de vie, c’est d’abord entendre, valider les ressentis des hommes et
des femmes âgées. C’est entendre leur histoire, car ils sont
aussi constitués de tous ceux qu’ils ont été au cours de leur vie et de
ceux dont ils sont issus. Il sont aussi tout ce qui anime leur présent… même
parfois leur vie amoureuse. On aurait tort de rire de leur sexualité. Parfois
ils n’y attachent aucune importance, d’autres fois elle compte beaucoup.
La vie, c’est naturellement la
famille présente, les petits enfants et arrières petits enfants. Ce sont
aussi toutes ces histoires de famille non résolues. C’est aussi
l’accomplissement de la naissance décrite dans le paragraphe précédant.
Fin de vie
Pour
mourir en paix, être entier. Pour
être entier, accueillir en soi tous ces bout de soi éparpillés dans le
temps de l’histoire personnelle et familiale. L’accompagnement
de fin de vie comporte bien-sûr des soins physiques.
Des plus simples qui consistent à humecter la bouche trop sèche jusqu’à
celui qui consiste à calmer chimiquement la douleur.
Mais il y a aussi les soins
psychologiques. Ceux-ci ne peuvent se résumer à de la technicité.
Ils demandent d'être présent sans détour (pas forcément longtemps, mais de
façon authentique - d'ailleurs le personnel n'a que peu de temps). Certaines
situations sont trop difficiles, certes, mais même les situations simples
sont si souvent mal gérées.
Voici
un exemple d’approche satisfaisante : Une ASH (agent
de service hospitalier) ayant parfaitement intégré les apports de la
formation sur l'aide a su accompagner remarquablement et simplement une
pensionnaire. Imaginez les questions qu’elle pose avec un ton délicat,
chaleureux et affirmatif se terminant par un point d’interrogation. Une
sorte d’affirmation interrogative. Le tout ponctué par une validation
(réception,
compréhension, accueil, gratitude) après chaque
réponse et avant chaque question
suivante.
La vielle dame dit "Je
vais mourir "
L’ASH lui répond "Vous allez mourir?"
La dame rectifie le mal entendu "Non! Je veux
mourir!"
L’ASH continue par "Ce serait mieux pour vous si
vous étiez morte?"
La dame répond "Oui, je pourrai rejoindre mon
mari!"
L’ASH lui demande "Vous aimez beaucoup votre
mari?".
La dame lui retourne un "Oui"
rempli d’un merveilleux sourire. Celui de quelqu’un qu’on vient de
comprendre, à qui on vient d’accorder de la vie dans ce qu’elle a de plus
précieux en elle.
L’ASH se retrouve aussi en paix et évidemment sans aucun stress, bien au
contraire.
Cette dame est décédée quelques
jours après de sa belle mort. Malgré sa demande de mourir l’euthanasie
aurait été ici hors sujet. Ce qu’il fallait ici c’est la comprendre et réhabiliter
ce qu’il y avait de si précieux en elle. Cela lui a permis d’aller
naturellement vers sa mort avec un sentiment d’accomplissement. Cela ne
l’a pas fait mourir, mais lui a peut être permis de ne pas résister à sa
mort au moment venu.
Ce moment
est un moment d’exception tant pour la vielle dame que pour l’ASH.
Cette dernière le garde comme un précieux instant.
Efficacité et stress des soignants
Vous travaillez dans le monde
soignant et vous occupez de personnes âgées ? Que vous soyez médecins,
infirmières, aides soignantes, agents de service hospitaliers, ergothérapeutes,
kinésithérapeutes, psychologues… ces lignes vous apporteront quelques éléments
s’ajoutant à vos connaissances et à votre expérience pour optimiser votre
travail.
L’optimiser
pour la qualité des soins, mais aussi pour votre confort professionnel. Pour
y parvenir, quelques uns des éléments clés sont :
-
Être distinct sans être distant.
- Être chaleureux sans être dans l’affectivité.
- Être proche sans se mettre à la place.
Pour éviter
les stress, nous éviterons donc l’empathie
autant que la prise de distance. Souvent
conseillées sans discernement, ces deux notions sont
des pièges qui engluent les soignants dans des comportements impossibles et
contradictoires. Il en résulte du stress, de l’inhumanité et de
l’affectivité. En effet, comment pourrait-on être empathique (se mettre à
la place) et en même temps garder une distance suffisante (être loin)?
La distance doit être prise avec
l'histoire de la personne, mais surtout pas avec la personne elle-même.
Le but
n’est pas de se protéger mais de s’ouvrir.
Ce
n’est pas d’avoir plus d’énergie, mais plutôt de moins se mettre en
lutte contre l’énergie du patient. C’est
de mieux faire équipe avec lui.
C’est
de mieux s’appuyer sur ses ressources à lui plutôt que de s’acharner à
développer les nôtres.
Il s’agit de développer une
affirmation de soi sans efforts et dans un grand respect d’autrui. Pour
mieux développer cette attitude nommée assertivité
(du latin assertio "affirmer" et en anglais assertiveness),
lire les dossiers de ce site sur la communication.
Toutes ces nuances permettent de développer
une grande qualité de l'aide et de
vraiment humaniser les soins.
Sans cela
l'humanisation tant évoquée n'est qu'un vain mot.
Ces nuances permettront de
diminuer le stress, de mieux prendre soin de soi et des patients, d’éviter
le burn-out auquel sont exposés
les soignants s’occupant de patients en situations extrêmes.
Thierry TOURNEBISE
Nombreux exemples
concernant les personnes âgées
dans les publicaitons ci-dessous
Bientraitance
Psychologie et violence dans le grand âge
Humanisation de la fin de vie
pour des informations médicales sur la
gérontologie,
consultez le site du Docteur Jean-Pierre MARTIN
(service de gériatrie à l'hôpital de Sarlat)
www.mathusalem.com |