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Les 12 fondamentaux en maïeusthésie  

en vue du colloque* de maïeusthésie de juin 2020
*colloque réservé aux praticiens certifiés et, dans la mesure des places disponibles, à ceux qui ont suivi au moins le niveau IV

Février 2020   -    © copyright Thierry TOURNEBISE

ABONNEMENT LETTRE INFO gratuite

ci-dessous texte commenté
si besoin également disponible : tableau mémo en pdf

Il est apparu nécessaire de proposer aux praticiens en maïeusthésie un listage condensé des éléments fondamentaux qui sécurisent leur travail. Le confort du praticien et le mieux être de ses patients en dépendent. D’autre part la maïeusthésie se développe, elle est enseignée par différentes personnes formatrices, les nouveaux praticiens sont certifiés par différents jurys… de ce fait pour qu’elle puisse fonctionner en auto-gouvernance sans risque d’altérer sa nature profonde, il était nécessaire d’en préciser des invariants incontournables.

Pour qui respecte ces 12 points, il y aura toujours des séances et des formations de qualité. Le défi de la maïeusthésie est en même temps sa précision, la rigueur des formations et des certifications, et la liberté de chacun dans sa créativité, sans que cela ne soit dommageable pour les patients, ni pour la pérennisation de l’approche, qui doit en même temps garder sa nature précise, et permettre aux praticiens d’être des chercheurs créatifs.

La maïeusthésie est une approche humaniste, une psychologie du Soi. En communication elle privilégie les interlocuteurs par rapport aux informations. En thérapie elle accompagne les pertinences à l’œuvre concernant les remédiations et les déploiements. Son champ s’étend du biographique au transpersonnel. Les 12 points développés ci-dessous permettent à cette approche de garder, de façon naturelle, une base et un cap précis tout en préservant la liberté et la créativité des praticiens. La maïeusthésie peut ainsi rester évolutive, offrir de la liberté, permettre de la créativité, et une mise en œuvre conjointe avec d’autres approches (intégrativité), sans risque d’être dénaturée.

Sommaire

1   Pertinence des symptômes

2   Etendue de la psyché

3   Des Êtres à  part entière

4   Acuité et priorités, non savoir, guidage non directif

5   Être touché sans être affecté

6   Réjouissance et confiance

7   Expérientiel, non pensable, Vie

8   Connivence avec l’Être émergeant

9   Résistances éclairantes

10 Racines et proches respectées

11 Uchrotopie des présences, archétypes existentiels

12 Liberté inaliénable

Bibliographie du site

1    Pertinence des symptômes

A différencier clairement de la recherche et de la correction des dysfonctionnements.

1.1    Ils pointent vers remédiations ou déploiements

Nous distinguerons les manifestations de type « mémoire » (pour des raisons de survie) et les manifestations de type « mémorial » (pour des raisons de complétude existentielle) . Les premières gardent une trace des faits, les secondes préservent une trace des Êtres ayant vécu ces faits.

La mémoire permet d’identifier notre passé. Suite à un événement émotionnellement fort, elle peut parfois produire des émergences réactionnelles très vives. Une situation présente, similaire à une situation émotionnelle antérieure, peut alors être source de réactions de survie de type « chat échaudé craint l’eau froide ». L’EMDR travaille très bien sur ce type de problématique liée à la mémoire des faits auxquels sont liées des émotions. Cette mémoire se réorganise pour ne plus induire de réaction inadaptée.

En maïeusthésie l’aspect « mémorial » (recherche spontanée de complétude existentielle) est le principal guide pour le praticien. Ce « mémorial » est le symptôme. Il pointe vers l’Être qui a vécu le fait et en a eu un éprouvé spécifique. La reconnaissance de cet Être et la validation de son éprouvé dans sa nature et sa dimension seront source immédiate d’apaisement. En même temps que l’aspect « mémorial » aura permis cette remédiation, l’aspect « mémoire » se trouvera spontanément reparamétré, réorganisé, dédramatisé, sans que rien n’en soit nié ou effacé.

La caractéristique de la maïeusthésie est de privilégier le « symptôme mémorial » », en vue de la remédiation ou du déploiement qu’il permet, plutôt que de prendre le « symptôme mémoire » pour cible à éradiquer.

1.2    Honorer le porteur de symptômes

Une fois la thérapie accomplie, il reste à ne pas négliger le « porteur de symptômes », c’est-à-dire celui qu’a été le patient et qui a éprouvé ce signal pendant une longue période de sa vie, parfois toute sa vie durant. Celui qui a porté ce symptôme a permis de garder un chemin vers la zone inestimable de la psyché où une reconnaissance et une validation sont attendues afin de restaurer une intégrité (remédiation) ou un déploiement (devenir qui l’on a à être).

Ce porteur de symptômes n’est jamais à éliminer ni à mépriser, mais à honorer, car il a permis la restauration ou l’accomplissement de l’intégrité. Il a été le gardien du « mémorial ». Le négliger (ou pire encore, le rejeter) peut conduire à une rechute qui devient alors le seul moyen de le recontacter et de lui donner la place qu’il mérite pour avoir contribué à qui nous sommes.

Publications
« 
Symptômes » juin 2011
« 
Honorer le porteur de symptômes » sept 2019
« 
psychologie de la pertinence » mai 2015
« 
Incontournable délicatesse et outrancières précautions » sept 2018
« 
La réalité, les vérités, le Réel » avril 2018

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2    Étendue de la psyché : du biographique au transpersonnel

A ce niveau, le praticien est à la fois en « non savoir » (indéfectible dans la vastitude des faits et des ressentis), et en « connaissance de la structure dynamique des archétypes existentiels » (pulsions de Vie et de survie, clivages/remédiations, compensations, déploiements). Il se laisse guider par le patient.

2.1    Du biographique au transpersonnel

La psyché est constituée de celui que nous sommes, de tous ceux que l’on a été (biographique) et de tous ceux dont on est issu (inter et trans générationnel). Mais il s’y trouvent aussi des éléments qui se situent au-delà de ces trois zones. Il s’agit d’Êtres qui n’appartiennent pas à la lignée, de pans entiers de l’humanité, dans le passé, dans le futur, hors temporalité, et même des éléments qui pourraient paraître « surnaturels ». Cette zone entièrement hors de la « mémoire » consciente est plus d’ordre « mémorial ». On la qualifie de « transpersonnelle ». Cet endroit de la psyché a particulièrement été investigué par le psychiatre Stanislav Grof (pionnier dans la recherche sur les états mofifiés de conscience). Cette zone de la psyché n’est pas objectivable, alors que les résultats obtenus lorsque l’on accomplit ce qui doit y être fait en termes de remédiations ou de déploiements le sont.

Les enjeux sont d’ordre « remédiations » (suite à des clivages protecteurs), « déploiements » (devenir qui l’on a à être), ou « systémiques » (en interaction réciproque avec le vécu d’autrui)… et souvent les trois.

2.2    Le corps comme interlocuteur

Il convient de ne pas oublier un élément essentiel : le corps. Il doit être considéré comme un Être à part entière, au même titre que tous les éléments de la psyché. Il se peut que son vécu émotionnel soit différent de celui de la psyché (l’un peut être en paix et l’autre en tourment). Les symptômes manifestés au niveau corporel ne sont pas toujours d’ordre psychosomatique au sens habituel du terme : ils ne manifestent pas une peine éprouvée par la psyché, mais une peine éprouvée par le corps lui-même, parfois même malmené par la psyché qui le néglige, le méprise, agit contre ses besoins, s’en éloigne etc…

La pensée n’en est pas forcément dualiste pour autant. Le corps peut être simplement considéré comme tous les autres éléments de la psyché, tout autant qu’il peut être considéré comme distinct de la psyché. Il est au moins aussi distinct de Soi que chacun de ceux que nous avons été qui sont en même temps chacun différents et dans la continuité d’un « même »… ou peut-être plus. Quelle que soit l’option envisagée, il doit dans tous les cas être considéré comme un interlocuteur, un Être à part entière, avec des éprouvés qui lui sont propres. Ce qui est objectivable à ce sujet, ce sont les résultats psychothérapiques obtenus dès lors qu’il est « entendu » et validé avec justesse dans ses éprouvés, là où les symptômes invitent à le faire. Cette zone est souvent une zone aveugle car les approches de psychothérapie n’envisagent pas cette dimension et se limitent au psychosomatique où le corps exprime une souffrance de la psyché… mais il arrive qu’il exprime sa propre souffrance émotionnelle, voire profondément existentielle.

Publication
« Le corps comme interlocuteur » janv 2013

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3    Des Êtres à part entière

Remédiations et déploiements sont un enjeu qui se situe bien au-delà du simple maintien homéostasique.
Il y a un accomplissement des pertinences en cours et un déploiement de ce qui est déjà là potentiellement.

Le praticien sait que chacun de ceux qu’on a été est un Être à part entière (et non une part de Soi), contenant même potentiellement l’entièreté de Soi (que ce soit biographique, transgénérationnel ou transpersonnel). Il y a « Soi dans le monde » et « le monde en Soi » en attente de déploiement. Il n’y a pas de « parts de Soi », mais à la rigueur des « à part de Soi » en attente de remédiation.

3.1    Les éléments

Dans ces différentes zones de la psyché se trouvent des éléments : 1/ Celui qu’on a été ; 2/ Celui qu’a été l’un de nos ascendants ; 3/ Un ou des Êtres de l’humanité ; 4/ Le corps à un moment de l’existence etc…

L’on parle souvent de « parts de Soi ». Or cette terminologie manque singulièrement de grâce. Une « part » c’est un « morceau », et ces Êtres de Soi ne sont pas respectés en étant traités de « morceaux ». Chacun d’entre eux n’est pas une part (un morceau), mais des Êtres à part entière. Par exemple l’enfant qu’on était n’est pas un « morceau de Soi » mais un Être à part entière, et c’est vrai pour tout élément de la psyché.

3.2    L’entièreté en chaque élément

Ces Êtres de Soi sont encore plus : ils contiennent chacun potentiellement l’entièreté de Soi. Un peu comme chaque morceau d’un cliché holographique contient l’entièreté de l’image, ou comme chaque cellule d’un corps contient l’entièreté du génome, ou selon Nassim Haramein chaque point contient l’entièreté de l’espace, ou selon Gottfried Wilhelm Leibniz chaque monade (unité de conscience) contient déjà « Tout » en attente de déploiement, etc..., chacun des Êtres de Soi contient l’entièreté de Soi en attente de déploiement, d’accomplissement.

On peut tout au plus parler d’« à part de Soi », quand ces Êtres de Soi sont clivés pour raison de survie, mais pas de « parts de Soi ». Non seulement ce sont des Êtres à part entière, mais en plus ils contiennent aussi chacun potentiellement l’entièreté de Soi.

Publication
« 
Part de Soi et entièreté » février 2014

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4    Acuité et priorités, non savoir, guidage non directif

Dans le lieu d’un drame, les Êtres qui l’ont vécu attendent d’être clairement différenciés de celui-ci, et de susciter de la réjouissance, un bonheur d’être rencontrés, et d’être validés dans leur éprouvé.

Le praticien différencie clairement entre les Êtres (l’existentiel), les ressentis (l’émotionnel) et les faits (le factuel, l’événementiel).

Le praticien priorise les Êtres (reconnaissance, considération). Les éprouvés sont en second plan (validations). Les circonstances (éventuelles estimations), restent en arrière-plan sans être négligées (parfois estimées, en vue de repères sociaux, selon qu’elles sont source de bonheur ou de peine). Le praticien est en non savoir quant aux faits et aux ressentis. Il permet aux patients de les révéler grâce au guidage non directif.

Il n’induit aucune réponse mais permet leur émergence grâce à des questions adaptées.

4.1    L’acuité du praticien

Le praticien est censé faire clairement la distinction entre les faits (ce qui s’est produit sur le plan événementiel), les Êtres (ceux qui ont vécu ces faits), et l’émotionnel (ce que ces Êtres ont éprouvé lors de ces faits).

Non seulement il fait clairement la distinction entre les trois, mais il priorise les Êtres qui seront toujours en premier plan. En second plan se trouveront les éprouvés, et en arrière-plan les faits.

Cela donnera toujours l’ordre suivant

1/Existentiel (qui attend reconnaissance et considération)
2/Emotionnel (qui doit être validé dans sa nature et sa dimension)
3/Evénementiel (qui parfois nécessite une estimation, c’est à dire une évaluation sociale en fonction de la joie ou de la peine dont il stimule l’émergence)

4.2    Le non-savoir source de compétences

Le praticien est en non-savoir quant aux événements et aux éprouvés (événementiel et émotionnel) du patient. Seul le patient détient les éléments à ce sujet et le praticien accepte son ignorance, tant que le patient ne l’en a pas informé par du verbal ou par du non verbal.

Plus encore, le patient est lui-même souvent ignorant quant à ce que celui qu’il était a éprouvé lors d’une situation antérieure. La mémoire reconstruit ce vécu ( alors « remasterisé ») et ce qu’elle en donne est souvent différent de ce qui a été éprouvé, jusqu’à parfois son contraire. Souvent, la mémoire a soit dramatisé, soit banalisé la réalité, et la seule source fiable reste celui qu’était le patient au moment de la circonstance. C’est pourquoi le praticien sait inviter le patient à demander en direct à celui qu’il était ce qu’il a éprouvé (c’est une source de première main).

Certes cette source n’est pas objectivable, mais elle se révèle bien plus efficiente en thérapie que ce que fournit la mémoire (qui d’ailleurs n’est pas objectivable non plus).

4.3    Non savoir et connaissance

Nous ajouterons le paradoxe que d’un côté il y a le non savoir incontournable concernant les faits et les ressentis, mais qu’en même temps le praticien a une connaissance des archétypes existentiels qui sont des structures dynamiques invariantes (voir le point 11). Cela lui permet de ne pas se perdre et d’avoir une vision claire des enjeux, sans s’égarer dans les détails inutiles. Il en découle, de sa part envers le patient, des questions (guidage non directif) ou des demandes pertinentes (requêtes, invitations à).

Publications
« 
L’emplacement subjectif du praticien » septembre 2016 
« 
Le non-savoir source de compétence » avril 2001
« 
Non-directivité » Janvier 2012

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5    Être touché sans être affecté

Prioriser l’Être permet au praticien d’être touché sans être affecté.

Résolument tourné vers l’Être et vers la Vie, le praticien a une intention de reconnaissance existentielle du Soi et de validation des ressentis éprouvés.

A ne pas confondre avec objectifs, projets (jeter devant), artifices ou attitudes feintes, car la réjouissance qui en découle (décrite au point 6) ne se décrète pas et vient naturellement de cette posture.

5.1    Le tact psychique

Alors que l’on se questionne souvent sur « la bonne distance professionnelle » chez les soignants, la bonne distance avec le patient, c’est quand il n’y en a pas. Même la « bonne proximité » ne suffit pas. Le praticien est censé être en « tact psychique » comme l’indique le mot allemand Einfühlung qui a donné « empathie » (où Fühlen signifie tact psychique tel le feeling anglais), ou encore l’Haptonomie (où hapsy signifie aussi tact psychique).

S’il peut y avoir socialement une distance physique convenable, psychiquement il ne doit pas y en avoir ni dans la psychothérapie, ni dans la communication. Pour que l’information passe entre deux Êtres, il doit y avoir « tact psychique » et non « distance », si minime soit-elle.

5.2    Être touché

Non seulement le tact psychique est essentiel, mais aussi le praticien se doit de « se sentir touché » par la présence existentielle de son patient. S’il a son attention sur l’Être qu’est son patient, il est naturellement touché par la présence de celui-ci. Si au contraire il a priorisé l’événementiel ou l’émotionnel, il risque d’être spontanément affecté par la nature dramatique des faits et des ressentis.

Le fait d’être touché sans être affecté ne dépend pas d’une capacité particulière mais seulement du fait que l’attention se porte sur l’Être (inestimable) plutôt que sur les faits (estimables - leur valeur peut être estimée) ou sur les émotions (simplement à valider). Comme évoqué au paragraphe 4.1, l’existentiel est en premier plan, l’émotionnel en second plan et l’événementiel en arrière-plan.

Le seul fait d’être touché constitue une validation existentielle. C’est un élément fondamental dans la thérapie.

Publications
« 
Positionnement du praticien » décembre 2007
« 
Les pièges de l’empathie » novembre 2001

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6    Réjouissance et confiance

Priorisant les Êtres par rapport aux faits, le praticien est spontanément dans l’indispensable réjouissance, en présence du patient, et surtout en présence des Êtres émergeants, avant même de les identifier.

Là se trouve une grande part de la fluidité et de l’effet thérapeutique. Sa confiance en les Êtres et en la pertinence en est indéfectible.

6.1    Réjouissance

Le praticien, qui est en tact psychique, s’attend à ce que la Vie se rejoigne ou se déploie chez son patient (la Vie est vue ici comme ce processus dynamique d’émergence de la conscience au cours de l’évolution tel que l’évoque Pierre Teilhard de Chardin, avec ce qu’il nomme « noosphère »). Le praticien en est par avance émerveillé. Non pas d’une façon gentillette ou un peu niaise, mais parce qu’en contact avec la Vie qui se rejoint à travers les symptômes du patient, il perçoit les enjeux archétypaux (voir 11) à l’œuvre, les pertinences en accomplissement, l’émergence d’un essentiel. En partenariat avec la Vie, il est sensible à celle-ci, en résonance avec sa trajectoire d’accomplissement, en termes de remédiations et de déploiements. Les Êtres de Soi qui appellent la conscience du patient à travers les symptômes sont source naturelle d’émerveillement, de réjouissance. Cela participe aussi à la validation existentielle et le patient va volontiers en lui vers ce qui provoque réjouissance chez le praticien. Le patient ira naturellement là où se trouve déjà le praticien en réjouissance. Il n’ira pas là où il lui demanderait d’aller (vers une sorte de « là-bas » où il n’est pas), et encore moins s’il le sent affecté par cet endroit vers lequel il lui demande de se diriger.

6.2    La confiance

Carl Rogers nous a fait bénéficier de la notion de « confiance inconditionnelle ». Cette confiance concerne la justesse à l’œuvre chez le patient. D’un côté le patient, de façon inaliénable reste inestimable sur le plan existentiel, de l’autre ce qu’il fait ou ce qu’il ressent, font toujours sens de façon évidente ou de façon discrète. Quand ce sens n’apparaît pas au praticien, il le demande à son patient, en lui accordant qu’il y en a un. Cependant, il ne va jamais forcer dans cette direction, car des affirmations péremptoires du genre « ce n’est pas pour rien », « il y a forcément une raison », « c’est que cela doit signifier quelque chose », « il s’y trouve un enseignement », sont des violences inacceptables de la part d’un praticien et constituent des nuisances.

Même un patient qui mentirait ou dissimulerait, aurait une juste raison de le faire. Cette confiance lui permet ainsi d’accéder plus facilement à ce qui appelle sa conscience en lui.

La moindre défiance de la part du praticien est source de blocages ou de réticences chez le patient. Comme le disaient Jung ou Rogers, les résistances des patients ne viennent pas des patients eux-mêmes, mais sont engendrées par la mauvaise pratique du thérapeute (voir citation, au fondement n°9, concernant les résistances).

Si la confiance et la réjouissance du praticien sont absentes ou insuffisantes, le patient ne peut accéder à lui-même et donne l’impression d’une résistance. Pourtant ce n’est pas lui qui est en cause dans cette « résistance », mais celui qui l’accompagne !

Publications
« 
Réjouissance thérapeutique » février 2017
« 
Confiance thérapeutique » avril 2017

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7    Expérientiel, Non pensable, Vie

Manifestations à distinguer clairement d’un signe de dysfonctionnement.

Le praticien s’ouvre avec sensibilité au « non pensable », au « non dicible » (l’indicible), à « l’expérientiel ».

Le praticien est en connivence avec la Vie, qui œuvre en vue de remédiations ou de déploiements (Noosphère). Il en est le partenaire confiant et indéfectible.

7.1    L’expérientiel

Le sensoriel permet de contacter la réalité et d’en rendre compte grâce à l’intellect et à la pensée qui en fait des images, des représentations mentales. L’expérientiel, lui, permet de contacter le Réel, mais il est plus délicat d’en rendre compte, car le vocabulaire disponible n’est pas construit pour cela.

Souvent l’expérientiel reste plus ou moins indicible (parfois non pensable). Nous en avons des exemples particulièrement explicites dans les expériences de mort imminente : le sujet dit quelques fois qu’il est l’espace et non qu’il s’y déplace, qu’il n’y a pas de temps, que tout est en même temps. Si nous considérons aussi les états psychotiques d’un autre endroit que du côté pathologique, il s’y trouve aussi une expérience hors du commun où le sujet, libre des limites, a le sentiment d’être toute l’humanité, et il ne sait pas comment en rendre compte avec des mots. Nous avons encore les cas de « conscience non locale », où le sujet perçoit à distance ce qui est inaccessible par les sens. Là aussi nous avons des expériences où le vocabulaire atteint sa limite.

Mais il y a également des situations de vie bien plus ordinaires (intuitions, concernement avec autrui, avec le nature) où nous sommes en peine d’énoncer ce qui est éprouvé.

N’oublions pas non plus les situations de psychothérapie : contact avec celui que nous étions dans une sorte de « communication présente » avec lui. On pourrait parler ici d’état modifié de conscience, où une sensibilité accrue permet de contacter le Réel (existentiel) qui se retrouve en premier plan par rapport à la réalité (sensorielle). Cette dernière n’est jamais occultée mais laisse le champ libre.

Rappelons-nous qu’il y a le Réel (accessible par l’expérientiel), la réalité (accessible par le sensoriel), les vérités (qui se démontrent et se défont au gré des raisonnements et des recherches).

7.2    Le non pensable

Au-delà de l’indicible, nous trouvons le non-pensable. Le fait qu’il n’y ait pas de mots pour dire simplement ce qui est éprouvé est une chose, mais il se peut aussi que la pensée ne sache elle-même pas en rendre compte. L’expérientiel ainsi peut être indicible, mais aussi non-pensable. La pensée ou les mots ne peuvent qu’en élaborer une approximation, une esquisse, souvent en utilisant une métaphore. Par exemple Lao Tseu, dans son « Tao Te King », nous dit que le Tao est semblable à une musique sans note ou à une image sans contour, et qu’il est néanmoins source de tout. Cela vaut souvent pour le Réel et l’expérientiel (le fameux « inouï » -le non entendu- du philosophe sinologue François Julien -l’Inouï, Grasset 2019).

Pour comprendre comment la pensée peut ainsi se retrouver en panne, prenons simplement une donnée géométrique parfaitement démontrée : si l’on pouvait « regarder » un cube depuis une 4e dimension, on en verrait toutes les faces en même temps sans avoir besoin d’en faire le tour et même l’intérieur sans qu’il ne soit nécessaire de l’ouvrir ou d’y entrer (comme pour un carré de deux dimensions, vu de dessus, depuis une troisième dimension). Le phénomène de quatre dimension est vrai géométriquement, mais la pensée ne sait pas se le représenter car celle-ci se limite à des représentations en trois dimensions. D’une autre façon, tout aussi vraie mais aussi peu pensable, si nous juxtaposons une infinité de points (le point n’a pas de dimension) nous avons une infinité de points contenus dans un espace à zéro dimension. Les points y sont juxtaposés, tous distincts, tout en étant au même endroit, sans pour autant y être superposés. Là notre pensée perd pieds et peine singulièrement à se le représenter.

Certains phénomènes comme ceux de « Near Death Expérience » ou « Expérience de Mort Imminente » nous rappellent ces notions : « je ne me déplace pas dans l’espace, je suis l’espace », «  il n’y a pas de temps, tout est là en même temps », « j’entends l’autre avant qu’il ne parle, car je suis lui, tout en étant moi » etc… Ce sont des vécus, dits « expériencés », réellement éprouvés, mais non sensoriels et mentalement non représentables.

« Je prenais conscience de l’univers, je pouvais me promener dedans sans bouger » (Jourdan, Jean-Pierre - Deadline,  dernière limite – Pocket Les 3 Orangers, 2006, p.596)

« J’ai revu l’intégralité de ma vie, en relief, avec tous ses détails, les gens, les situations. Mais dans un temps qui ne s’écoule pas, la vie étant une globalité que l’on observe avec cette intelligence (universelle ou globale). » (ibid., p.573)

« Mon ″moi″ n’était pas là en tant qu’individu rendant les comptes de SA vie, mais mon ″je″ était la vie de tous les humains ; en d’autres termes, c’était un bilan global à l’échelle de l’espèce. » (ibid., p.589).

« Je suis dedans, dehors à la fois, l’impression d’un ensemble, d’un tout. Je deviens cette Connaissance, cette lumière, cette douceur… je suis tout cela à la fois » (ibid., p.594).

« Vous êtes le lieu, l’acteur, le moyen, la cause, l’effet,  le ressentant, et le faisant ressentir, le contenu et le contenant » (ibid., p.597).

Si nous trouvons ces notions éprouvées en situation extrêmes de NDE ou EMI, elles existent  aussi en suituations bien plus ordinaires et constituent le « non pensable » et « l’indicible » : intuition, perception non locale, éprouvés indéfinissables.

En thérapie également : présence de celui que nous étions, qui nous livre son expérience vécue de son point de vue (très souvent différent de ce que contient notre mémoire). Nous pourrions alors parler d’« états modifiés de conscience », dans le sens d’une conscience augmentée.

7.3    La Vie

Trop souvent l’on confond la Vie et l’énergie. La Vie n’est pas une énergie subtile, elle est d’un autre ordre. L’énergie est liée au « faire » (ergo= travail), la Vie est liée à l’« être » (vita =, entièreté d’une existence). La vie se tient au niveau du Réel, l’énergie elle, se tient au niveau de la réalité.

Pierre Teilhard de Chardin a parfaitement nuancé ce fait en proposant que nous avons : la « géosphère » où se trouve l’énergie physique, la « biosphère » où se trouve l’énergie vitale (grouillement cellulaire sur la planète) et la « noosphère » où se trouve la conscience.

Dans la zone de l’énergie circule l’information, dans la zone de la Vie se trouve ce que, selon Ervin László, les scientifiques nomment l’in-formation qui est disponible partout sans consommer d’énergie (ce qui se passe localement est en même temps disponible globalement).

En psychothérapie, il importe de comprendre ces notions de noosphère, de Vie et d’in-formation, et de ne pas se limiter à l’événementiel historique.

Lire à ce sujet la publication de mai 2016 « Vie et énergie ».

Publications
« Psychopathologie » avr 2008
« 
Symptômes » juin 2011
« Honorer le porteur de symptôme » sept 2019
« Mieux comprendre la psychose » oct 2012
« 
Réflexions sur l’autisme » sept 2013
« 
Post traumatique » mai 2017
« Vie et énergie » mai 2016
« De la conscience à l’Un-conscient » oct 2019
« 
Archétypes existentiels » nov 2019

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8    Connivence avec l’Être émergeant

Proche du patient, le praticien se tourne néanmoins surtout en connivence avec l’Être émergeant qui appelle la conscience de celui-ci en vue de reconnaissance et de validation, (mais avec soin concernant le moindre ressenti actuel du patient). C’est cet Être émergeant qui amène le patient en consultation grâce au symptôme.

Le praticien s’ouvre à l’appel de cet Être émergeant et en est proche par avance. Cela constitue un principe essentiel.

A différencier de toute invitation à s’en libérer ou s’apaiser. Il serait même maladroit de demander au patient d’aller vers cet Être émergeant tout en restant soi-même à distance de cet endroit …quand bien même le praticien serait très proche du patient.

8.1    L’Être émergeant

Les symptômes pointent vers ce qui, en nous, appelle la conscience en vue de remédiation ou de déploiement. Ce qui appelle est le plus souvent un Être de Soi qui a été clivé pour raison de survie. Le symptôme ne signale pas alors un dysfonctionnement mais un élan pertinent vers une complétude.

Cet Être émergeant bénéficie de l’attention du praticien, qui lui accorde sa reconnaissance, avant même qu’il ne soit identifié par guidage non directif. Le praticien est d’avance touché par cette dimension existentielle qui se manifeste à travers le symptôme.

8.2    La connivence

Le praticien est en proximité avec le patient, touché par l’Être qu’il est, et totalement en alliance avec lui durant toute la démarche thérapeutique.

Cependant, il est encore plus en proximité et en alliance avec cet Être de Soi qui, chez le patient, appelle la conscience à travers le symptôme. Une sorte de « lieu sacré » de la psyché qui attend d’être rencontré tout en délicatesse (subtilité), mais sans précautions (ni protocoles, ni ritualisations). Cet endroit de la psyché est à rencontrer tout naturellement, comme un ami qu’on a le plaisir de retrouver.

Le praticien est en connivence avec cet Être émergeant bien plus qu’avec le patient (qui voulait s’en débarrasser), mais il va accomplir la remédiation tout en respectant absolument toutes les hésitations du patient, qui indiquent le meilleur chemin pour y parvenir.

Le praticien est en équipe avec cet Être émergeant, avec le patient, mais aussi avec la Vie qui œuvre avec pertinence. La thérapie s’accomplit donc avec une équipe de quatre !

Publications
« 
Confiance thérapeutique » avril 2017
« 
Vie et énergie » mai 2016
« 
S’ouvrir à ce qui appelle et non chercher ce qui se cache » janvier 2019
« 
Emplacement subjectif du praticien » sept 2016
« 
Incontournable délicatesse et outrancières précautions » sept 2018

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9    Résistances éclairantes

Le praticien est particulièrement respectueux des « résistances ». Il sait que ce sont de précieux indicateurs d’ajustements de trajectoire pour respecter la pertinence à l’œuvre.

A distinguer de toute volonté consciente ou inconsciente du patient de bloquer le processus thérapeutique.

9.1    Jung et Rogers à propos des résistances

Ces deux auteurs ont donné un avis très clair sur les résistances :

« Dans la littérature il est tellement souvent question de résistances du malade que cela pourrait donner à penser qu’on tente de lui imposer des directives, alors que c’est en lui que de façon naturelle, doivent croître les forces de guérison ». (Jung - Ma vie, souvenirs rêves et pensées- Gallimard Folio, 1973, p.157)

« …la résistance à la thérapie et au thérapeute n’est ni une phase inévitable, ni une phase désirable de la psychothérapie, mais elle naît avant tout des piètres techniques de l’aidant dans le maniement des problèmes et des sentiments du client ». (Rogers - Relation d’aide et psychothérapie - ESF, Paris 1996, p.155)

9.2    La réjouissance du praticien face à une résistance

Quand le patient ne valide pas une proposition du praticien, celui-ci est en profonde réjouissance face à cet ajustement qui s’offre pour ne pas emprunter un mauvais chemin. Quand un patient refuse quelque chose émanant du praticien, c’est toujours pour donner une précision nécessaire. Quand bien même cette résistance concerne des choses évoquées par le patient lui-même, la question chez le praticien est toujours « en quoi est-il juste pour le patient de ne pas valider cela ? ». Le praticien est à ce sujet en confiance inconditionnelle.

9.3    Le patient ne résiste pas : il éclaire

Même quand le patient a identifié ce qui appelle sa conscience, il se peut qu’un obstacle l’empêche de le rejoindre. Un mur, un blocage, un fossé, un gouffre, un refus, un rejet, une peur… tout ce qui se présente entre le patient et ce qu’il est censé retrouver n’est en fait pas un obstacle, mais un indicateur de la meilleure façon de procéder indiquant qui écouter plus attentivement, quelle démarche suivre, dans quel ordre. Bien souvent en mettant son attention sur l’obstacle et sa nature, se dessine un chemin plus pertinent pour aboutir à la remédiation. Il importe pour le praticien de toujours se demander (et donc de demander à son patient) si c’est le patient qui, pour une raison lui appartenant, ne souhaite pas cette remédiation, si c’est l’Être émergeant qui ne le souhaite pas, ou si c’est un tiers qui ne souhaite pas qu’ils se retrouvent.

Publications :
« 
Non-directivité et validations » janv 2012
« 
Evolution, être libre du déni » janv 2018

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10     Racines et proches respectés

Le praticien est aussi en absolu respect et profonde reconnaissance envers les proches du patient.

Le conjoint, les parents les enfants, les racines familiales, sont toujours en parfaite sécurité dans tout l’espace de l’entretien, même si les émotions du patient y sont toujours validées.

Les Êtres et les actes y sont toujours différenciés avec acuité. Le praticien invite à une posture sans rancune ni pardon, mais avec une délicate reconnaissance de tous les protagonistes.

Si toutefois le praticien n’invite à aucune mise à distance psychique (et n’en a pas lui même) envers les racines ou les proches, une distance physique du patient peut parfois être nécessaire en situation de pression majeure ou de danger (agressions, violences, harclèlement, menaces envers l’intégrité physique).

10.1      Inter et trans générationnel

Quand les symptômes du patient résultent d’un vécu des parents et grands-parents on parle d’ « intergénérationnel ». Quand les symptômes résultent d’un vécu éprouvé par des aïeux lointains, on utilise le terme « transgénérationnel ».

Il arrive que pour accéder à ces zones l’on utilise ce que l’on nomme un psycho génogramme (arbre généalogique avec le vécu des ascendants, les prénoms, événements rencontrés par les ancêtres). L’inconvénient est alors le risque d’intellectualiser la démarche. L’accès se fera avec plus de justesse en partant du ressenti éprouvé dans le symptôme du patient, en le décrivant, puis en suivant le cheminement vers ceux qui l’ont éprouvé (le patient lui-même à d’autres époques de sa vie ou des ascendants au cours de la leur). Le patient peut identifier ainsi des zones dont il savait l’existence, mais dont il ignorait l’importance, et même parfois dont il ignorait l’existence.

10.2         Quand un ascendant est source du trauma

Dans le vécu des ascendants, il arrive qu’un parent ou un grand parent, ou un membre de la famille, soit source d’actes indélicats, douloureux, parfois violents, parfois même judiciairement répréhensibles. Que la loi fasse son travail est une chose, que ces Êtres soient méprisés en est une autre, surtout si le patient ou l’un de ses parents en est issu : être issu d’une personne monstrualisée, ça ne fonctionne pas, car l’enfant d’un monstre serait un monstre lui-même.

La démarche doit d’une part prendre en compte le vécu éprouvé par celui qu’il qui en a souffert, mais aussi d’autre part prendre en compte ce qui a motivé les actes des auteurs indélicats. Sans pour autant « excuser » ou « pardonner » les actes, il conviendra de distinguer « ce qu’ils ont fait » de « qui ils sont » et de « ce qui les a conduits à cela ». L’on peut ainsi avoir un jugement sur l’acte (clarification des valeurs humaines et sociales) tout en gardant une considération indéfectible concernant l’Être. L’acte est une chose (estimable, évaluable), l’Être est quelqu’un (inestimable, hors du champ des valeurs).

10.3         La dimension systémique

Dans un couple, dans une famille, dans un groupe, il y a la dimension propre à chacun, mais aussi une dimension systémique où tout est plus ou moins en interaction avec tous. Par interactions systémiques l’on entend que les symptômes de l’un peuvent être là pour éclairer l’autre. Le symptôme éprouvé par quelqu’un n’est pas forcément à sa propre destination, mais peut être à celle d’une autre personne qui est ainsi invitée à accomplir en elle une remédiation ou un déploiement. C’est assez courant dans le couple ou dans une famille, mais c’est aussi présent dans le monde social, pour ne pas dire dans les Mondes. Dans ce cas on pourrait parler « d’hypersystémie ».

 Publications
« 
Validation existentielle » 10 sept 2018
« 
Sans rancune ni pardon mais avec humanité » nov 2016
« 
Vivre son couple » févr 2009
« 
Irrépressibles quêtes d’origine » juill 2011

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11     Uchrotopie des phénomènes, archétypes existentiels

Aux yeux du praticien, le passé, le futur, le présent font partie de la psyché où tout est contemporain de tout, de façon atemporelle. Ni chronique ni topique, nous dirons que la psyché est Uchrotopie (ni temporelle, ni spatiale).

Il est dans le non savoir concernant les faits, les lieux, les époques et les ressentis. Mais en même temps, il est dans la connaissance de la structure dynamique des archétypes existentiels (Vie/survie).

L’Être de Soi y est « identifié », et non « localisé » de façon spatiale ou temporelle.

11.1         Le temps et l’espace (la  réalité)

Dans la « réalité », zone sensorielle, ce qui se passe est assujetti au temps et à l’espace. Il y a un lieu, une circonstance, une époque, où celui que nous étions a vécu ce qui s’est passé, où l’Être émergeant en psychothérapie s’est trouvé faire l’expérience d’un éprouvé précis.

Il convient cependant de distinguer ce qui a été éprouvé de ce qui s’est passé. Une même circonstance peut avoir été vécue de différentes façons selon les moyens que l’on avait d’y faire face.

11.2          Une présence continue, uchrotopie (le Réel)

Dans le « Réel », zone expérientielle, il s’agirait plus d’une sorte de panorama sans images, atemporel. Le détail événementiel et le temps n’y sont plus essentiels. L’Être que nous avons été et qui a éprouvé ce qu’il a éprouvé n’a jamais cessé d’être présent en nous. Il s’y trouve soit de façon intégrée à la psyché, soit de façon clivée si l’éprouvé est trop douloureux, s’il n’y est pas intégrable spontanément. Dans toutes les époques ultérieures, la présence de chacun de ceux que nous avons été sera constante soit en « présence ressource » (intégrée), soit comme « manquante » (clivée).

En maïeusthésie nous ne faisons pas un voyage dans le temps, mais un pas vers ces Êtres de Soi clivés, qui n’ont jamais cessé d’être là depuis tout ce temps.

Il importe cependant de comprendre que chacun de ceux que nous avons été est un Être à part entière, contenant potentiellement l’entièreté de Soi. Il importe aussi de comprendre que ce que l’on nomme « réintégration » ou « remédiation », consiste en fait à permettre à cet Être de Soi de vivre en occupant « toute sa place », de telle façon qu’il peut occuper toute la psyché (ce n’est pas simplement un morceau d’espace qu’on lui offre, mais tout l’espace où il se déploie).

Plus que de parler de remédiation, l’on pourrait quasiment parler de « re-immédiation », en ce sens où il n’y a aucun intermédiaire (aucun média ou médium). En effet, tous ces Êtres de Soi occupent « chacun et ensemble » une totalité de la psyché où, tous en même temps, sont déployés dans l’entièreté de « l’espace et du temps », tout en restant distincts les uns des autres.

Ainsi la psyché ne répond pas aux habituels critères d’espace et de temps. Elle n’est ni topique (elle est utopique – sans espace) ni chronique (elle est uchronique – sans temps), mais bien réelle : on peut dire qu’elle est uchrotopique.

D’où « un panorama sans images » avec juste des interactions entre des Êtres de Soi clivés ou intégrés. Nous y rejoignons une finalité de complétude et de déploiement. Cette finalité n’est ni écrite, ni déterminée, mais elle est source des phénomènes de la psyché, de telle façon que nous y trouvons des structures invariantes que nous pouvons nommer « archétypes existentiels ».

11.3          Les archétypes existentiels

La notion d’archétypes existentiels nous permet d’identifier des structures invariantes au sein de la psyché. Celles-ci nous servent de repères clarificateurs au sein d’une inextricable complexité, qu’il s’agisse de biographique, de transgénérationnel ou de transpersonnel, qu’il s’agisse de mémoire classique ou d’inconscient, ou de l’un-conscient ou d’in-formation.

Sans la compréhension de ces invariants, il est quasi impossible de s’y retrouver et l’on ne fait qu’errer au fil des événements plus ou moins mémorisés. Si, au lieu d’une rencontre au cœur de la psyché le patient ne fait que raconter les drames qu’il a rencontrés, il ne fait que réactiver de vieilles douleurs sans permettre la moindre intégration, voire en générant de nouvelles recrudescences, de nouvelles blessures, … et de nouveaux clivages.

La connaissance des archétypes existentiels permet au praticien de bénéficier d’un « panorama sans images », où les protagonistes et leurs interactions apparaissent clairement. La reconnaissance peut y être généreusement accordée et les validations soigneusement accomplies.


Publications
« 
Causalité et finalité » juill 2014
« 
Part de Soi et entièreté » février 2014
« 
De l’espace et du temps » avr 2009
« 
De la conscience à l’Un-conscient » oct 2019
« 
Archétypes existentiels » novembre 2019

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12     Liberté inaliénable

Le praticien met un soin tout particulier à ce que le patient reste libre à tout instant de dire ses propos ou de les taire, de reprendre ou non un rendez-vous, et de ne jamais être invalidé dans les démarches antérieures qu’il a suivies, ou dans ses projets.

Il fait en sorte que le patient se sente à la fois libre et accompagné.

Toute invalidation de ce qui a été juste pour lui à un moment donné (dans d’autres démarches), ou qui le sera ultérieurement (élan de tenter d’autres approches), est éthiquement inacceptable.

12.1          Les rendez-vous

A la fin d’un entretien le patient est en liberté absolue de prendre ou non un autre rendez-vous. Il doit se sentir libre, mais jamais abandonné. Aucune incitation du praticien n’est éthiquement acceptable pour susciter un autre entretien, mais une mise à disposition est essentielle afin que le patient se sente toujours accompagné. Si c’est juste pour le patient, il peut reprendre rendez-vous, tout en restant dans la liberté de l’annuler, si des changements qui ne le rendent plus nécessaire se sont accomplis.

Quand une séance n’a pas abouti à un point où le symptôme initial n’a plus besoin de s’exprimer, une autre séance peut être proposée, mais jamais imposée.

12.2          Absence de toutes pressions

Qu’il s’agisse de consultations, de formations ou d’ateliers, la liberté est inaliénable et fait partie intégrante de la démarche. Toute pression à quelque niveau que ce soit est contraire à l’esprit maïeusthésique. La considération, la confiance et le respect en sont des composantes inaliénables.

12.3              Confiance inconditionnelle

Le praticien a une confiance inconditionnelle envers l’Être qu’est son patient (attention la confiance en l’Être ne signifie pas la confiance en la vérité de ses paroles ou l’innocuité de ses actes, mais la confiance en le fait qu’il y a une raison qu’il en soit ainsi).

Le praticien a une confiance toute aussi délicate envers les Êtres émergeant de la psyché du patient. Il a même avec eux une connivence prioritaire car ce sont eux qui, à travers les symptômes, appellent la conscience du patient en vue de bénéficier d’une reconnaissance et de validations.

Le praticien a aussi une confiance indéfectible en la Vie qui, à travers tout ce qui se passe chez le patient, œuvre afin de se rejoindre elle-même de la plus juste façon. La réjouissance résulte de cet accomplissement, conjointement éprouvée par le praticien, le patient, les Êtres émergeants et la Vie.

Publications
« 
Être libre du sectarisme » janv 2015
« 
Le danger de convaincre » juin 2002
« 
Eloge de la différence » août 2008
« 
Primum non nocere » déc 2013

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 Thierry TOURNEBISE

si besoin également disponible : tableau mémo en pdf